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Près de Marseille, l’enseignement secondaire doit passer la seconde

À l’heure où l’Éducation Nationale est en crise, les conditions semblent particulièrement difficiles pour les professeurs et les élèves de l’enseignement secondaire de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. Établissements vétustes, matériel qui laisse à désirer ou manque de place : les difficultés sont amplifiées. Les collectivités aident, mais paraissent remplir un océan avec une pipette.

« Pendant un moment, on a eu peur de ne pas pouvoir accueillir les élèves au retour des vacances de Noël”, témoigne Marion Chopinet, secrétaire académique du SNES-FSU (Syndicat national des enseignements de second degré) d’Aix-Marseille. Avec l’explosion des prix de l’électricité qui a suivi le début de la guerre en Ukraine, certains collèges et lycées des Bouches-du-Rhône (13) ont eu peur de voir leurs factures de chauffage atteindre des sommes astronomiques. Certains bâtiments sont vétustes, mal isolés, voire ont régulièrement des problèmes de maintenance au niveau des chaudières. Une situation difficile pourtant connue de l’académie, selon Marion Chopinet. “Je pense en premier au collège Versailles, dans le IIIe arrondissement de Marseille. Nous venons de faire un signalement important autour du lycée Paul-Cézanne à Aix-en-Provence. Ce sont des bâtiments qui n’ont jamais été rénovés, ou il y a trente ans et qui doivent être rafraîchis”, nous expliquait la professeur d’histoire-géographie au mois d’octobre 2022.

Effectivement, certains établissements ont été construits au début des années 1960, comme le lycée Paul-Cézanne, et n’ont jamais profité de travaux pour leur donner un coup de jeune. « Le gouvernement d’Élisabeth Borne poursuit une politique de démantèlement du service public et de précarisation de l’Éducation nationale », s’indigne Manuel Bompard, député La France Insoumise (LFI)/NUPES de la 4ème circonscription des Bouches-du-Rhône. Si la plus grande crainte du rectorat à l’heure actuelle demeure les factures énergétiques, la mauvaise isolation des collèges et lycées de la métropole d’Aix-Marseille-Provence a déjà été source de problèmes il y a trois ans. Un chantier entamé par le Département des Bouches-du-Rhône avec justement pour but de rénover une partie du collège Versailles avait dû être stoppé en raison de la présence d’amiante dans les murs. Cette matière, auparavant utilisée pour l’isolation acoustique et thermique des constructions a été interdite en France en 1997 à cause de ses propriétés toxiques et cancérigènes. Les travaux commencés au collège Versailles en 2020 risquaient de propager la substance toxique en dehors des cloisons, car l’amiante n’est dangereuse que si les fibres sont exposées à l’air libre.

Le lycée Paul-Cézanne d’Aix-en-Provence à son ouverture en 1962. C’est un des premiers lycées de second cycle en France (crédit : Académie d’Aix-Marseille)

Reconstruire pour être économique et écologique

À l’heure de la transition énergétique, que compte faire Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation, pour mettre au pas ses ouailles ? En réalité, pour voir fleurir des collèges et des lycées en “classement énergétique A”, il ne faut pas attendre quoi que ce soit de la rue de Grenelle. “Ce n’est pas de notre ressort, il faut voir ça avec les collectivités territoriales”, nous a-t-on répondu au ministère de l’Éducation Nationale. Effectivement, ce sont les Départements qui s’occupent des collèges et les lycées sont gérés par les régions. “Panneaux photovoltaïques, […] réduction des déchets : “les lycées de la Région Sud sont résolument tournés vers l’environnement. À l’heure où la jeune génération s’engage chaque jour pour lutter contre le réchauffement climatique, nous mettons tout en œuvre pour poursuivre cet objectif commun, au service de leur bien-être et de notre planète », promet dans un communiqué de presse Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (PACA), également appelée Région Sud. L’élu a annoncé vouloir rénover tous les lycées de la région afin de les rendre plus respectueux de l’environnement et plus faciles d’accès aux personnes en situation de handicap d’ici à 2027. La Région PACA souhaite par exemple investir durant l’année scolaire 2022-2023 la somme de 262 millions d’euros dans ses lycées. Plus concrètement, le lycée Jean-Perrin à Marseille a bénéficié de 3,9 millions d’euros pour la rénovation de la cantine et la création d’une nouvelle cafétéria, et 1,3 million d’euros ont été versés pour la rénovation des locaux de chauffage et d’ECS (eau chaude via l’énergie solaire). 

Du côté des collèges, le Département des Bouches-du-Rhône, n’a pas souhaité nous répondre de vive voix, malgré de multiples sollicitations. Cependant, des projets ont tout de même été mis en place. Le Département a prévu d’engager plus de 290 millions d’euros en cinq ans pour réhabiliter et construire de nouveaux bâtiments. Cette opération baptisée “Charlemagne” prévoit que “chaque élève étudie dans un collège neuf ou rénové d’ici à 2027”, annonce le communiqué. Au total, six projets ont été annoncés avec des échéances pour l’année 2022-2023. Le collège Versaille (IIIe arrondissement de Marseille), dont les travaux avaient dû être mis en pause à cause de l’amiante présent dans ses murs, a finalement bien été rénové et rendu comme neuf aux élèves après les vacances de la Toussaint. Un plateau sportif devrait être livré à l’établissement dans le courant de l’année 2023. Pour ce projet de déconstruction-reconstruction, le Département avait versé 27,5 millions d’euros. À Aix-en-Provence, le collège Saint-Eutrope a entièrement refait son isolation thermique jusqu’en décembre 2022, grâce à un chèque de 7,5 millions d’euros de la part de la collectivité territoriale. Au premier trimestre 2023, le collège des Caillols, dans le XIIe arrondissement de Marseille, devrait bénéficier d’une nouvelle salle polyvalente, pour la modique somme de 2,9 millions d’euros.

De nombreuses actions qui ne satisfont pas réellement les élus locaux en poste sur la métropole d’Aix-Marseille-Provence, au vu du peu de moyens mis à dispositions des établissements auparavant. Sur l’année scolaire 2020-2021, 22,3 % des collégiens de l’Académie étaient situés en réseau d’éducation prioritaire (REP et REP+). Manuel Bompard a constaté les difficultés rencontrées par les établissements de sa juridiction, classés en majorité en REP et REP + : “Un seul mot : catastrophique. Les locaux sont souvent dégradés. C’est l’avenir de nos enfants qui est sacrifié au nom d’une idéologie libérale mortifère.”, s’indigne l’élu de la NUPES. Selon lui, l’Académie et plus particulièrement sa circonscription, qui couvre les quartiers Nord de la cité Phocéenne, ont été mises à mal par les politiques d’austérité de ses adversaires idéologiques. “Les politiques menées au niveau national, régional et départemental par la droite LR (NDLR : Les Républicains) et la droite macroniste (sic) sont pleinement responsables de ce saccage” affirme le nouveau coordinateur du groupe LFI. “La Ville de Marseille, le Département des Bouches-du-Rhône et la Région PACA ont eu le triple malheur d’avoir la droite la plus incompétente de tout le pays. Un bien triste privilège”, poursuit-il. Si, malgré le mécontentement des élus d’opposition, les collectivités territoriales essayent tout de même d’investir dans la rénovation de leurs collèges et lycées, auront-elles, à termes, suffisamment de moyens pour y parvenir seules ? En dépit de la réluctance du ministère de l’Éducation Nationale, la rue de Grenelle ne devrait-elle pas mettre la main à la poche pour soutenir davantage les investissements locaux ? Le désir de transition écologique du gouvernement d’Elisabeth Borne serait peut-être le prétexte idéal pour que l’État aide les collectivités en réalisant les financements nécessaires aux travaux de rénovation à deux.

En tant que député, Manuel Bompard aurait souhaité donner des fournitures gratuites et sans marque à tous les élèves pour « assurer une réelle égalité » (crédit : Wikimédia Commons/SarahBulle)

Trop d’élèves, pas assez de bâtiments

À la rentrée 2022, c’est un total de 118 946 collégiens et 79 106 lycéens qui entraient dans les établissements scolaires de l’Académie d’Aix-Marseille. Certains bâtiments sont arrivés depuis bien longtemps à saturation : tables et chaises sont en nombre insuffisant et on ne peut pas pousser les murs. Le lycée Paul-Cézanne d’Aix-en-Provence accueille en moyenne entre 2200 et 2300 élèves : sa capacité originelle est de 1650 élèves. “Les collèges et lycées construits dans les années 1960 n’étaient pas prévus pour accueillir autant d’élèves. On essaye de bourrer au maximum mais ça donne des salles où on a du mal à circuler. Quand un élève avec des besoins spéciaux a une AESH (NDLR : Accompagnant des élèves en situation de handicap), on ne sait pas où les mettre ”, soupire Marion Chopinet, secrétaire académique du SNES-FSU d’Aix-Marseille. Le manque de salles suffisamment grandes pour accueillir des classes de 37 élèves peut mener à de véritables casse-têtes pour créer les emplois du temps. Certaines zones manquent d’établissements et les étudiants doivent donc se diriger vers les collèges et lycées voisins, même s’ils sont déjà pleins. 

Pour remédier à cela, le Département des Bouches-du-Rhône et la Région PACA ont décidé de sortir de terre de nouveaux bâtiments. Le collège de Lançon-Provence a été inauguré à la rentrée 2022 à Lançon-de-Provence, grâce à un financement de 26,5 millions d’euros du Département. S’il n’accueille pour l’instant que les classes de cinquième et de sixième, ce sont à terme 750 collégiens qui pourront y étudier. En 2021, l’ancienne caserne des pompiers sur le site d’Aurelle, à Marseille a été proposée par la mairie pour être convertie en collège. Le nouvel établissement du VIIe arrondissement, nommé collège Gaston-Defferre, nécessitera 34 millions d’euros pour être créé, équipé d’un plateau sportif, d’un gymnase et d’une salle polyvalente. Les travaux commenceront en 2024, pour pouvoir accueillir 720 élèves à la rentrée 2025. Le dernier projet attendu par les collégiens de l’Académie devrait être livré en 2023. Le futur collège des Amandeirets, à Châteauneuf-les-Martigues, qui aura coûté 35 millions d’euros pour sa reconstruction totale, pourra accueillir jusqu’à 900 élèves. Pour les lycéens, la Région PACA n’est pas en reste. Cinq nouveaux établissements devraient être construits entre 2024 et 2026, dont deux dans l’Académie d’Aix-Marseille. Le nouveau lycée général et technologique, à Lambesc, devrait pouvoir recevoir 1300 élèves d’ici à la rentrée 2026. La Cité Scolaire Internationale Jacques-Chirac de Marseille devrait, elle, ouvrir ses portes en 2024 et permettra à 1100 élèves de venir étudier dans le IIe arrondissement. La Cité Scolaire accueillera en plus des lycées des classes allant du CP à la troisième. Ce projet ambitieux sera subventionné à hauteur de 100 millions d’euros par la Région PACA, le Département des Bouches-du-Rhône, l’Académie d’Aix-Marseille et la Ville de Marseille.

Mais cela suffira-t-il ? “Dans le XIVe arrondissement de Marseille il n’y a pas de lycée général public. Il n’y a pas non plus de lycée professionnel public dans les quartiers Nord de Marseille”, décrit la secrétaire académique. À Aix-en-Provence, le manque de lycées généraux publics se fait aussi sentir. Si la ville d’environ 146 000 habitants compte trois lycées d’enseignement général public (Paul-Cézanne, Vauvenargues et Émile-Zola), les établissements sont déjà complets. Seul le lycée Émile-Zola peut se permettre de “pousser les murs” en récupérant un local voisin, propriété du rectorat. Les élèves habitant au sud de la capitale des comtes de Provence doivent se réorienter tant bien que mal dans les établissements des communes alentours, comme le lycée Marie-Madeleine-Fourcade de Gardanne ou se reporter sur le lycée international Georges-Duby, aussi à Aix-en-Provence. Pour les lycéens habitant dans le nord d’Aix-en-Provence, l’autre établissement le plus proche est le lycée Val de Durance, situé à Pertuis, soit un trajet d’environ 22 kilomètres. Entre les villes de Salon-de-Provence, au centre des Bouches-du-Rhône, d’Aix-en-Provence, au nord-est du département et de Pertuis, à la limite entre les Bouches-du-Rhône et le département voisin du Vaucluse (84), il n’y a pas un seul lycée. De quoi encombrer encore un peu plus les établissements déjà saturés.

Carte des lycées autour d’Aix-en-Provence. Entre Aix, Pertuis et Salon-de-Provence plus à l’ouest, il n’y a pas d’établissement (crédit : carte interactive de la Région PACA)

Le matériel scolaire au centre du débat

En dehors des problèmes de bâti, les établissements font aussi face à des soucis matériels et techniques. Dans son communiqué en vue de la rentrée scolaire 2022/2023, la région PACA s’était engagée à rendre ses lycées plus faciles d’accès pour les personnes en situation de handicap. Pour les élèves ou membres du corps enseignant souffrants de troubles moteurs, cela passera essentiellement par l’élargissement des couloirs et des portes, l’installation de toilettes PMR (Personne à Mobilité Réduite) et de rampes d’accès, ainsi que la mises en place d’ascenseurs pour les établissements qui n’en possédaient pas déjà. Seulement, avec la hausse des demandes d’ascenseurs, les collèges et lycées de la métropole d’Aix-Marseille-Provence pourraient bien se retrouver face à un problème qu’ils connaissaient déjà mais de façon démultipliée : le manque d’ascensoriste pour faire les maintenances. Les appareils ne peuvent pas fonctionner sans des maintenances régulières, sans lesquelles ils deviennent une source de danger. Or, les entreprises de réparation souffrent d’un manque de personnel qualifié, et, depuis la guerre en Ukraine, d’une pénurie de matériaux. Si ce problème n’est pas endémique à la région PACA, les chefs d’établissement devront soit payer des frais de maintenance faramineux pour s’assurer d’avoir des ascenseurs fonctionnels dans les temps, soit laisser leurs appareils hors-services, au détriment des élèves et du corps enseignant.

Les professeurs sont également confrontés à un manque de matériel scolaire, à commencer par le leur. “Le nombre de postes informatiques par rapport au nombre de personnel dans l’établissement est hautement insuffisant”, explique Marion Chopinet. “Si vous comptez que, par exemple, dans une salle des profs, selon la taille de l’établissement, il y a entre trois et dix postes, ça ne fait même pas un poste pour quinze professeurs”, poursuit-elle. Pour elle, les salles informatiques et les pièces équipées de vidéoprojecteurs se généralisent, mais ce n’est pas suffisant. Une analyse partagée par Marine Rosset, ancienne professeure d’histoire-géographie en Seine-Saint-Denis (93), conseillère éducation et jeunesse de ce département et ex-candidate du Parti Socialiste aux élections législatives 2022 sous la bannière de la NUPES. “Quand vous êtes professeur, vous n’avez pas votre ordinateur attribué. De plus, les établissements font face à des problèmes de maintenance informatique. Un ordinateur, ça ne se change pas comme un tableau. Quand, sur une heure de cours, l’ordinateur met dix minutes à s’allumer, c’est un problème”, illustre l’ancienne candidate à la 2eme circonscription de Paris. 

Selon Marine Rosset, ce manque de matériel pourrait faire partie d’un des nombreux facteurs responsables de la perte d’attractivité du métier d’enseignant. “Je suis convaincue qu’avoir suffisamment de fournitures pour les professeurs comme des ordinateurs ou des téléphones professionnels peut inciter la nouvelle génération à venir enseigner. Il faut redonner envie”, affirme la conseillère éducation et jeunesse. Pour l’ancienne professeure, construire d’autres espaces de travail isolés pour les professeurs en dehors de la salle des profs, en vue d’accueillir des parents ou simplement pour corriger des copies contribuerait également à donner un regain d’attractivité au métier. À l’intérieur comme à l’extérieur des établissements, elle juge impératif des travaux pour les bâtiments vétustes pour donner envie aux enseignants mais aussi aux élèves de venir tous les matins.

Pour les fournitures de ses élèves, le Département des Bouches-du-Rhône a mis la main au porte-monnaie. Les collégiens de chacune des 92 communes de la métropole d’Aix-Marseille-Provence ont pu bénéficier à la rentrée 2022 d’un kit de fourniture, coûtant environ 60 euros l’unité. Le kit des élèves de 6e est un peu plus fourni que celui des niveaux supérieurs car il contient notamment une calculatrice, une équerre et un compas que les collégiens n’auront normalement pas à racheter pour les années suivantes, contrairement aux cahiers et autres stylos. De plus, face à la surcharge des cartables et face à la demande insistante des collèges, les Bouches-du-Rhône ont financé l’achat d’un deuxième jeu de manuels scolaires, permettant aux élèves de garder un jeu à la maison.Depuis quelques années, le Département fournit également, pour tous les élèves de 6ème, une tablette numérique pour leur permettre d’accéder à “de nombreux contenus pédagogiques” et de travailler dans les meilleures conditions. Ces outils sont distribués pour toute la durée de la scolarité. Récemment, la collectivité a voulu donner un écran tactile aux élèves ayant terminé leur dernière année dans un collège inscrit au Plan Numérique Départemental. Les élèves de 4ème qui souhaitent s’orienter vers une filière professionnelle sont également concernés. À la suite de la réforme du baccalauréat, la Région PACA a commencé à proposer aux lycées volontaires ces écrans tactiles. Elle fournit en plus des manuels scolaires entièrement numériques. Elle a évalué le coût de fournitures à près de 80 millions d’euros sur 4 ans, dont 23 millions pour la première année. Cependant, les tablettes attribuées aux élèves sont données dans l’état et ne peuvent pas être interchangées en cas d’incident. Pour les élèves de SEGPA (Section d’enseignement général et professionnel adapté), les Bouches-du-Rhône allouent une aide de cent euros pour l’achat des tenues spécifiques nécessaires pour les stages professionnels (casques, chaussures de sécurité, etc.…).

On n’a pas de chauffage, mais on a des tablettes ?

Malgré les efforts des collectivités territoriales, les enseignants se sentent abandonnés. “J’ai eu des remontées de tous les syndicats enseignants. Collèges, lycées, enseignement général, technologique ou professionnel. Tous. Et ils sont inquiets pour leur avenir”, nous confie Sébastien Delogu, député LFI/NUPES de la 7ème circonscription des Bouches-du-Rhône. Pour la secrétaire académique du SNES-FSU d’Aix-Marseille, il s’agit bien plus que d’un abandon de la part du ministère de l’Éducation Nationale. “Depuis 2017, on assiste à une destruction organisée de l’Éducation Nationale à tous les niveaux. Et les élèves sont les premiers à en souffrir”, affirme Marion Chopinet. Selon elle, il faudrait que le gouvernement fasse “exactement l’inverse” de toutes les politiques mises en place pour l’enseignement secondaire depuis 2017. Elle désirerait l’ouverture de postes d’enseignants, plus de moyens matériels et financiers, pour remonter la pente. Le 18 novembre 2022, le ministre de l’Éducation, Pap Ndiaye, s’est rendu dans le lycée polyvalent régional Saint-Exupéry (XVe arrondissement de Marseille), aussi appelé “Lycée Nord”, car seul établissement général public des quartiers Nord de la cité phocéenne.

Le ministre a proposé la création de locaux temporaires pour pouvoir de nouveaux professer les 70h de cours manquantes par mois, faute de place. Faute de mieux aussi ? Toutes ces tablettes, ces calculatrices, ces terrains de sports flambants neufs sont-ils de réels progrès ou simplement de quoi faire oublier l’état lamentable de l’Éducation Nationale dans certains endroits de notre territoire ? Peut-on croire à l’égalité des chances, quand le seul lycée général présent dans un quartier plus peuplé que la ville de Lille n’est même pas considéré comme en REP, alors que plus de trois-quarts des élèves y sont boursiers ? “Un pansement sur une jambe de bois demeure un pansement et est, à ce titre, mieux que rien. Mais nous ne réglerons pas le problème tant que nous n’aurons pas une réelle rupture politique au niveau national, régional et départemental”, considère Manuel Bompard. Pour une éventuelle rupture politique, il faudra attendre 2027, qui réunira les scrutins des élections présidentielles, législatives, régionales et départementales.

Encadré : “L’école du futur” mais seulement en primaire

Ce projet, imaginé par Emmanuel Macron en septembre 2021, a pour but d’aider la deuxième ville de France à rattraper son retard, alors que le taux de pauvreté dépasse les 50% dans certains quartiers. Il devrait permettre aux établissements de monter un projet innovant autour de la culture, des langues, de l’environnement ou des sciences en donnant aux directeurs d’école la possibilité de participer davantage au recrutement de leur équipe pédagogique. Par exemple, à l’école primaire Menpenti, dans le Xe arrondissement de Marseille, les élèves de maternelle découvrent ainsi les mathématiques de manière ludique, en déplaçant des “abeilles robot” sur un damier. Pour cette expérimentation, l’État a débloqué une enveloppe de 2,5 millions d’euros. À ce jour, 360 000 euros ont été engagés. Cependant, le souhait du président se heurte aux réalités du terrain. Le fait que le gouvernement fournisse des fonds pour développer de nouvelles activités ne permet pas de rénover les bâtiments qui en ont besoin. Par exemple, les enseignants de l’école La Busserine, dans les quartiers nord de Marseille, ont vu l’un des plafonds s’effondrer en juin 2021. De plus, ce projet, aussi idéaliste soit-il, ne concerne que les écoles primaires pour le moment.

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