Depuis presque cent-an, le 93 rue de Crimée, abrite dans l’ombre l’église orthodoxe Saint-Serge de Radonège, un site historique et quasi-unique dans la capitale.
Dans les rues de Crimée, il est difficile d’apercevoir l’Église en haut de la colline. Seuls les habitués ou les riverains savent où s’aventurer pour accéder au lieu. « Quand j’ai emménagé, je ne savais pas qu’il y avait cette église, ce n’est que six mois après grâce à une voisine que j’ai su que j’habitais juste à côté de ce superbe lieu » raconte Sidonie une riveraine installée dans le quartier depuis 4 ans. Pour atteindre ce « trésor caché » de Paris, le chemin est long et sinueux. Après avoir passé une grille en fer, il faut traverser une allée étroite et pénétrer des lieux qui semblent abandonnés. La dernière étape avant l’église est un vieux garage qui porte l’inscription « LIBRAIRIE » à peine visible. Une fois à l’intérieur, les couleurs somptueuses et vives et les peintures murales rendent le lieu chaleureux.
Un lieu Historique totalement rénové
Avant d’être l’Église orthodoxe d’aujourd’hui, le lieu était une église luthérienne Allemande construite en 1891. Considéré comme un exemple de l’architecture byzantine en France, le lieu de culte est confisqué après la Première Guerre mondiale avant d’être mis en vente par le gouvernement français. Dans le même temps, en 1917, la France connait une forte immigration russe. La Cathédrale Saint-Alexandre Nevsky située dans le 17e arrondissement est à cette période le seul vrai lieu de culte réservé aux migrants orthodoxes. Trop nombreux après les différentes migrations, la communauté orthodoxe de Paris choisi d’acquérir en 1924 le terrain pour y construire une nouvelle église. L’idée était aussi de proposer au sein de l’église, une école de théologie pour former de futurs prêtres dans l’idée de retourner en Russie et pour répondre aux demandes des communautés de la capitale. C’est précisément le 18 juillet 1924 que l’Église est acheté aux enchères, le jour de la fête orthodoxe de Saint Serge de Radonège d’où le nom du lieu. Les mois qui suivent l’achat sont dédiés à la rénovation du lieu et sa transformation en église traditionnelle russe. Cette rénovation est perçue comme une « fantastique supercherie » comme l’explique au journal le Parisien l’historien Cyril Semenoff. C’est pour cette raison que les visiteurs sont souvent surpris une fois qu’ils aient pénétré les lieux. Avec une structure extérieure constituée principalement de bois, l’intérieur est fait de murs de briques. Cette rénovation intérieure, a été réalisée par le célèbre décorateur de théâtre Dimitri Stellesky. Surnommé le « Michel Ange » russe, il a rénové en seulement deux ans l’église, se chargeant du dessin, de la peinture et de la sculpture avec pour seules aides deux personnes qui broyaient les couleurs dont il avait besoin pour la peinture. Aujourd’hui, l’intérieur du lieu de culte ne se visite que si l’un des popes (prêtre orthodoxe) accepte de vous ouvrir. Les dimanches et les jours de fête sont souvent remplis de fidèles, c’est l’occasion pour les visiteurs de découvrir le lieu. « En-dehors des jours d’office, je n’ai jamais vu le lieu ouvert » raconte Jean qui habite à cent mètres de l’église depuis 25 ans. Le constat est le même pour les fidèles :« Je suis venu pour notre Noël le 7 janvier dernier, en dehors des dimanches et des jours de fête, le lieu n’est pas très fréquenté ». Ce lieu somptueux et historique est encore trop peu connu par les Parisiens à cause de sa localisation et de ses faibles horaires d’ouvertures.