Avant un nouveau 49.3, le gouvernement a bien adopté des amendements, dont celui visant à renforcer et à améliorer les conditions des EHPAD (Établissements d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes).
Malgré les tensions au sein de l’Assemblée à la suite des différents 49.3 utilisés par la Première ministre et les motions de censure déposées par les groupes d’opposition, les députés sont parvenus à s’entendre autour de quelques lois de la PLFSS. (Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale).
Parmi celles-ci, le renforcement et l’amélioration des contrôles au sein des EHPAD ont bien été votés. Ce projet de loi a été validé pour renforcer les outils à la disposition des pouvoirs publics et pour s’assurer que l’argent versé aux EHPAD soit bien utilisé. Bien avant l’adoption du projet de loi, le PLFSS prévoyait déjà, pour 2023, de rectifier le tir et d’apprendre de ses erreurs après les révélations du journaliste Victor Castanet sur le groupe Orpea dans « Les fossoyeurs ». Dans son livre, le journaliste s’interrogeait sur l’utilisation de l’argent public versé à ces établissements. À l’intérieur de celui-ci, il stigmatise la maltraitance des résidents qui est liée, selon lui, à une mauvaise gestion du groupe de maisons de retraite.
Bien avant les discussions autour de l’adoption de ce projet de loi, le gouvernement avait déjà promis de multiplier les contrôles et d’y apporter davantage d’attention. C’est donc, dans cette optique que les députés de l’Assemblée ont voté en faveur de plusieurs amendements visant à éviter qu’un scandale comme celui d’Orpea ne se reproduise.
Les changements en 2023 ?
Dans les différentes mesures qui verront le jour en 2023, le gouvernement mise d’abord sur la dissuasion. Pour cela, en cas de non-respect des conditions de vie des résidents, le montant maximum des sanctions économiques applicables augmentera de 4 % (amende de maximum 1 % du chiffre d’affaires de l’établissement aujourd’hui contre 5 % en 2023). Les députés peuvent désormais contrôler à distance les sièges sociaux des groupes d’EHPAD. Dans ce même cadre, les magistrats pourront désormais vérifier et contrôler les recettes d’hébergement des établissements ainsi que les prestations annexes facturées aux usagers. Enfin, sur demande de la députée LFI et vice-présidente de la chambre basse du Parlement Caroline Fiat, un ratio minimal d’encadrement des résidents par le personnel soignant sera instauré. Ce ratio serait d’au moins six agents soignants pour dix résidents en EHPAD. Un ratio qui devrait changer le mode de fonctionnement de certains établissements et encourager à l’embauche.
Dans un EHPAD à Clermont-Ferrand, le ratio d’agents soignants est de cinq pour dix patients nous rapporte Pascale.D, l’une des aides-soignantes de l’établissement, un chiffre « trop bas » selon elle dû à la médicalisation de plus en plus importante. Au sein d’une maison de retraite Orpea à Paris, le ratio est de trois à quatre soignants pour dix malade.
Un chiffre bas notamment parce que le métier est sous payé nous explique le directeur adjoint de l’établissement : « Dans la réalité du terrain, ce qui n’est pas forcément dit, c’est que c’est un métier très mal payé surtout à Paris. Peut-être qu’ailleurs ça se passe aussi, souvent les aides-soignantes ou les auxiliaires de vie, par exemple, cumulent plusieurs emplois. Parfois, cela peut affecter la prise en charge des résidents cela a de l’impact, car la motivation psychologique est impactée, les soignantes sont donc quelques fois moins opérationnelles. » affirme-t-il.
Le gouvernement a profité du vote des différents amendements pour rappeler que près de 600 établissements ont déjà été contrôlés.
Un scandale qui laisse des traces
Après l’affaire Orpea, la méfiance vis-à-vis des établissements accueillants les personnes âgées dépendantes a augmenté « Il y a eu des familles qui se sont méfiées, qui ont commencé à poser des questions inhabituelles du style : « Est-ce qu’il est bien douché tous les jours ? » « Est-ce qu’il a bien son repas aux bons horaires ? » … On a aussi eu le cas des familles qui ont appelé juste pour insulter le personnel de l’accueil, la direction ou les soignantes. Il y avait beaucoup plus d’animosité, d’agressivité de certaines familles envers les soignants », raconte Nathan.M, directeur adjoint Orpea.
Il poursuit : « Chaque EHPAD a son organisation donc s’il y a eu des problèmes organisationnels au sein du groupe Orpea, il ne faut pas mettre tous les établissements dans le même panier. Il faut vraiment faire des enquêtes et se focaliser sur celles où il y a eu des problèmes, trouver la cause et régler le problème.
Le but étant bien évidemment de garder une politique bienveillante pour les résidents et pour les familles. Ici, on pense toujours aux résidents et aux soignants, leur confort et leurs conditions de travail sont primordiales ».
Au-delà des maisons de retraite Orpea, la révélation de cette affaire à impacté l’ensemble de la profession. « Évidemment, avec une affaire de cette ampleur, les familles se posent des questions. Comme nous ne sommes pas un établissement Orpea on a moins été pointé du doigt, les familles ont confiance en nous », raconte Pascal.D aide-soignante.
Après une affaire aussi médiatisée que celle-ci, le gouvernement a annoncé une multiplication des contrôles dans les établissements et principalement au sein du groupe.
Bien que les maisons de celui-ci connaissent depuis un moment des vérifications : « On a déjà eu plusieurs contrôles venants de l’inspection du travail ou de cabinets d’audit extérieur. Ils vérifient énormément de choses à vrai dire. Globalement ce qu’ils demandent, ce sont les plannings sur les trois dernières années, ceux de jour et de nuit. Ils vérifient aussi que les soignants qui ont exercé avaient bien un diplôme, une déclaration de travail et une déclaration unique d’embauche (DUE). Il nous était aussi demandé tous les documents officiels : le cahier pour la répartition des protections, le cahier des repas pour vérifier que c’était bien équilibré. » nous explique Nathan.M.
« La traçabilité sur tout en fait : les soins, la nourriture, les protections de propretés (ex : les couches), les commandes étaient vérifiées pour voir si les quantités utilisées correspondent bien aux besoins. »
Dans un autre registre, les auditeurs font « passer un entretien à chaque membre du personnel où les questions sont afférentes au poste de chacun ».
Des mesures qui ne devraient donc apparemment pas perturber plus que cela le rythme de travail et les valeurs de chaque EHPAD.