
Lors d’un dîner à l’Élysée le 28 septembre dernier, le chef d’État a menacé de dissoudre l’Assemblée Nationale. Peu probable, une dissolution aurait pu profondément bouleverser le paysage politique français.
Depuis le début du second manda d’Emmanuel Macron, la menace d’une dissolution plane au dessus de l’Assemblée Nationale. Lors des législatives en juin dernier, La Nupes ainsi que le Rassemblement National se sont démarqués de leurs adversaires. Et ce, grâce à leur nombre de députés, qui siègent désormais dans l’hémicycle. La Nupes occupe 131 places et le Rassemblement National 89. Le parti « Ensemble » du Président, ne possède qu’une partie relativement majoritaire des députés. Avec 245 élus à l’Assemblée, l’exécutif voit donc son pouvoir affaiblie, par rapport au mandat précédent.
Très vite, le scénario d’une dissolution à l’Assemblée a agité le paysage politique français. Mais ce n’est que le 28 septembre, lors d’un diner à l’Élysée, que le chef de l’État menace de la « dissoudre dans la minute qui suit » si la motion de censure, quant à l’examen de la réforme des retraites, est adoptée par les élus LR. La Nupes avait déposé une première motion de censure, après l’utilisation du 49.3 par le gouvernement sur le projet de loi sur le budget 2023 qui avait obtenu 239 voix sur les 289, pour atteindre la majorité absolue.
La motion de censure doit comptabiliser les voix de tous les députés de la Nupes, LR ainsi que celles des députés RN pour être adoptée. La Nupes et le RN se sont alliés pour contrer le gouvernement. Cette contre-alliance n’est pas au goût de tous, et a créée un certain malaise chez les députés de la Nupes. De plus réussir à rallier les Républicains serait un véritable exploit. Ils ne possèdent plus que 60 sièges à l’Assemblée, et n’ont aucun intérêt à les risquer. Pour eux, repartir en campagne n’est pas envisageable pour des raisons évidentes de budget et de sureté. Le scénario d’une dissolution dans l’hémicycle tombe à l’eau pour cette fois. Le risque reste tout de même présent, lorsque ces questions budgétaires seront de nouveau abordées dans les prochaines années de mandat à venir.
À qui profiterait cette dissolution ?
La dissolution de l’Assemblée marquerait le retour des parlementaires à la campagne électorale et déclencherait de nouvelles élections législatives, moins d’un an après les élections présidentielles. De plus, repartir en campagne représente un coût pour le moins faramineux.
Cela devrait affaiblir encore plus les caisses de chaque parti, dont celui des Républicains, qui peinent à se remettre de l’échec cuisant de leur candidate, Valérie Pécresse, aux présidentielles en mai dernier.
Le Rassemblement National, qui occupent quatre-vingt neuf sièges dans l’hémicycle, s’est montré favorable et confiant, pour un retour aux urnes. Et pour cause, c’est un record pour l’extrême droite qui obtenait moins de 10% de l’effectif total à l’Assemblée lors des précédentes élections. Marine Le Pen , présidente du RN , en a profité pour défier Emmanuel Macron, à la suite de sa menace proférée lors du dîner à l’Élysée , en lui rétorquant « Chiche ! ».
Quant à la Nupes, rien n’est moins sûr. Leurs 151 sièges à l’Assemblée furent en grande partie acquis par rapport à leur proposition de la réforme des retraites. Ce scénario a des chances de se reproduire. Cependant, le parti a récemment été ébranlé par différentes polémiques, dont l’affaire Quatennens. Les prises de position de Jean-Luc Mélenchon à ce sujet n’ont pas été très appréciées par l’opinion publique. Sa côte de popularité en a souffert et a chuté.
Du côté de la majorité présidentielle, un retour en campagne serait tout à fait envisageable d’un point de vue budgétaire. Même si des députés restent sceptiques, d’autres se disent prêts à repartir en campagne, bien que très peu croient en cette dissolution, comme l’avait assuré Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance.
Une décision à double tranchant
Bien que cette hypothèse soit balayée par le vote des élus LR contre la motion de censure soumise par la NUPES, la dissolution de l’Assemblée aurait pu avoir de lourdes conséquences, sur la politique menée par l’exécutif.
Cette décision est a double tranchant. Emmanuel Macron risque de voir son nombre de députés diminuer d’avantage. Par conséquent, le président peut perdre la majorité à l’Assemblée si il décide toutefois de la dissoudre.
Pour rappel, Jacques Chirac avait fait le choix de dissoudre l’assemblée en 1997. Alors qu’il détenait la majorité écrasante des élus en faveur de son parti politique, le président avait déclaré avoir « besoin d’une majorité ressourcée et disposant du temps nécessaire à l’action » afin de justifier ce choix , qualifiée de « dissolution à l’anglaise ». Conséquences : un retour aux urnes soldé par une victoire de la gauche qui soutenait le gouvernement de Lionel Jospin.
Si Emmanuel Macron met sa menace à exécution, le même sort pourrait lui être réservé.