Bayeux 2022 Magazine

Festival Prix Bayeux : Les jeunes envahissent la petite ville normande

Chaque année, le festival des correspondants de guerre de Bayeux est investi par de nombreux scolaires. Cette année, les chiffres sont records, notamment pour le dispositif  »regard des jeunes » qui a réuni près de 70 établissements et plus de 16 000 votes.

Pourquoi le Festival du Prix Bayeux attire-t-il autant de collégiens et lycéens ? Car il s’agit d’un événement « percutant, pertinent et essentiel pour les élèves », explique Claire Beauruel, chargée des scolaires au sein du service communication de la mairie de Bayeux. « Il permet aux jeunes de pouvoir échanger et développer leur esprit critique », a de son côté déclaré le journaliste Nicolas Poincaré, dans son discours d’ouverture, à la remise des prix le samedi 8 octobre. Le but donc : faire de ces jeunes de futurs citoyens éveillés sur les enjeux du monde.  
Les enseignants sont unanimes : « l’événement vient compléter les cours d’histoire et d’éducation aux médias ». Leurs élèves repartent avec un bagage éducatif et culturel conséquent. Si les professeurs d’histoire relatent aux élèves le passé, les reporters de guerre leur montrent le présent et leur offrent peut-être des clés pour construire un futur meilleur.

Sans avoir la volonté de faire de ces jeunes des reporters de guerre, ces quelques jours à Bayeux leur permettent a minima de comprendre la réalité du métier. Des vocations naissent ou se perdre au fil de la semaine, mais une chose reste certaine : pour beaucoup, il y a un avant et un après Bayeux.

Pendant 4 jours, Le Virus de l’Info a rencontré des jeunes et a couvert l’événement avec et grâce à eux. Reportage en images.

Inter’Act Tour : sensibilisation à la cause des réfugiés au collège de la Mine

Le festival du Prix Bayeux est aussi l’occasion d’aborder des notions d’inclusion et de partage. Entre témoignage, atelier et dégustation de repas typique, l’Inter’Act Tour s’invite pendant une journée dans des collèges aux alentours de Bayeux. Vendredi 7 octobre, Le Virus de l’Info à suivi l’intervention au Molay-Littry, à 15 kilomètres de Bayeux.

Thomas, réfugié africain, contraint de fuir son pays en raison de son orientation sexuelle. Devant une quarantaine d’élèves attentifs, il livre son parcours. © Lucy Bigard
Des élèves à l’écoute et intéressés par le discours de Thomas. Après la rencontre, pendant le repas, les réactions seront multiples « je ne savais pas que ça n’était pas accepté dans d’autres pays » admet une élève, « ça m’a rendu un peu triste » ou plus directement, « c’est chaud ». © Lucy Bigard
Les collégiens impatients de découvrir le repas afghan proposé à la cantine. Thomas souriant, bienveillant et satisfait après avoir livré son témoignage.© Lucy Bigard
Ali, réfugié politique, cuisine des spécialités afghanes pour les collégiens de Molay-Littry. Au menu : « Kabuli Palaw » (riz du Kaboul) & « rôte » © Lucy Bigard
Les élèves, conquis par leur déjeuner afghan.© Lucy Bigard
Avant de commencer un atelier de danse, les élèves écoutent le parcours d’Amari. Cette danseuse – chanteuse est née en Colombie, mais a grandi au Venezuela. Elle explique, « j’étais là-bas, à l’époque où le Venezuela était le Dubaï latino-américain, et la Colombie sous l’emprise des narco-politiques ». © Lucy Bigard

Conférence à la salle des Logis

Samedi 8 octobre, 14h30, 250 scolaires ont rendez-vous pour une rencontre avec Anna Shpakova et Simon Suleymani, résidents de la Maison des Journalistes. Tous deux livrent leurs parcours et expliquent les objectifs et la vocation de cette association qu’ils ont rejoint quelques mois auparavant. La Maison des Journalistes œuvre pour la liberté d’expression, « elle accueille et accompagne des professionnels des médias exilés en France », témoignent-ils. À 16h, les deux journalistes laissent la parole au reporter-photographe Raphael Yaghobzadeh, pour une intervention passionnante. Malgré cela, après quelques jours de Festival, la fatigue et la baisse de concentration commencent à se faire ressentir chez certains élèves…

La salle est presque comble. 250 élèves sont prêts a écouter les témoignages de Anna Shpakova, Simon Suleymani et Raphael Yaghobzadeh, trois journalistes aux parcours de vie très différents. © Lucy Bigard
Sophie Allais, professeur d’Histoire au lycée Millet de Cherbourg, répond avec pédagogie et bienveillance aux dernières questions de ses élèves, avant le début de la conférence. © Lucy Bigard
Entre curiosité et fatigue, les lycéens écoutent à présent le récit du reporter Rafael Yaghobzadeh. © Lucy Bigard
Une accolade, un geste tendre et du soutien pour affronter la dureté du terrain, la réalité du monde. © Lucy Bigard
« À Bayeux, j’ai découvert la photographie et notamment l’aspect technique que je maîtrisais très mal. Depuis, je veux devenir photographe […] en zones de conflits, on verra plus tard. » Paul, 17 ans, lycée à Cabourg. © Lucy Bigard
Un moment d’inattention… « c’est difficile de bosser le samedi » Pauline, 17 ans © Lucy Bigard
3 heures de conférence et beaucoup d’informations à digérer pour des lycéens. Vers 17h, les rencontrent s’achèvent. Un jeune homme, sort de la salle des Logis, l’air assommé : « c’était cool mais c’était trop long ». Ses camarades sont unanimes « ouais grave ! ». Peut-être un bon résumé de cette assemblée ? © Lucy Bigard

Finir en beauté avec la remise des prix

Pour clôturer le Festival, les élèves ont assisté le samedi 8 octobre à 19h, à la cérémonie de remise des prix. Après une longue demie-heure d’attente devant le chapiteau, ils ont pu découvrir les lauréats. L’occasion également de faire une synthèse de tous les événements présentés à Bayeux cette année (expositions, films projetés, dispositifs mis en place…). Photographier pour immortaliser, acclamer pour féliciter ou tout simplement rester pétrifié et sidéré : les réactions et les attitudes des élèves étaient aussi hétéroclites qu’intéressantes à observer et à décrypter… Plus de 2h de cérémonie, durant lesquels les étudiants ont choisi leur mode d’expression.

« J’ai l’impression d’aller à la cérémonie des Césars. », « c’est ma première remise de prix », « on n’est même pas bien habillé » : dans la file d’attente, les lycéens s’impatientent et discutent pour faire passer les temps. © Lucy Bigard
Garder un souvenir, immortaliser un moment.  » À mon avis, vous ne pouvez pas dire que vous avez vu quelque chose à fond si vous n’en avez pas pris une photographie. » – Emile Zola © Lucy Bigard
Chaque année, des jeunes s’improvisent journalistes durant leur immersion à Bayeux. À la fin de la semaine, ils publient « Citoyen du monde ». Distribué gratuitement à tous, à l’entrée de la salle, ce journal rend compte de la participation des lycéens lors de leur semaine. Une réalisation dont les élèves se disent « très fiers ». © Lucy Bigard
Le lycée Jean-François Millet, à Cherbourg, acclame Evgeniy Maloletka et Mstyslav Chernov lauréats pour le prix « Image Vidéo » et « Photo ». © Lucy Bigard
Standing ovation pour Evgeniy Maloletka et Mstyslav Chernov lorsqu’ils sont nommés lauréats. Ces journalistes sont les deux seuls à avoir réalisé des reportages sur la maternité bombardée de Marioupol. La salle les acclame plusieurs minutes.© Lucy Bigard
Sidéré ou épuisé, cet étudiant reste stoïque pendant que toute la salle se vide autour de lui. © Lucy Bigard

Dans les rues de Bayeux …

C’est peut-être au final dans les rues de la ville qu’on en apprend le plus sur eux. Souvent par petits groupes, les jeunes « débriefent », parlent de leurs ressentis et de leurs impressions. Certains avouent avoir besoin d’extérioriser, comme Alix, en terminale spécialité géopolitique au lycée Lebrun. Elle témoigne : « on échange beaucoup entre nous. Il faut, c’est important. Il ne faut pas garder ça pour soi ».

Jeudi 7 octobre. Des lycéens de Coutances, après la projection du film Shooting War de Patrick Dell dans La Halle ô Grains. © Lucy Bigard
Ils sont comme essaimés à travers la ville. À chaque coin de rue, on peut les voir. Cette année 2022, les scolaires sont venus massivement au Festival du Prix Bayeux. © Lucy Bigard
Devant la salle de remise des prix, en patientant, les étudiants essayent de faire un « faux duplex », ils s’entraînent à faire un « live ». © Lucy Bigard
Courte pause et dernier rayon de soleil avant d’assister à la Cérémonie de Remise des Prix qui signe, pour les jeunes, la fin du Festival.© Lucy Bigard

« Je suis un peu chamboulée par tout ce que j’ai vu durant ces trois jours » confie une lycéenne avant de reprendre le bus direction Coutances. En chargeant sa valise dans le coffre de l’autobus, elle ajoute, « mais j’ai pris conscience de certaines réalités essentielles ».
Des élèves marqués par les expositions, les projections et les rencontres qu’ils ont fait, mais également plus éveillés aux enjeux du monde qui les entoure. Quoi qu’il en soit, le festival de Bayeux semble les avoir conquis, car ils se projettent déjà sur la 30è édition !

Lucy Bigard

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