Ce samedi 8 octobre, l’Agence française de développement a organisé une table ronde pour discuter des conséquences de la guerre en Ukraine sur l’Afrique. L’occasion de mettre en lumière la situation des populations africaines qui subissent une crise alimentaire sans précédent.
Selon le dernier rapport publié par Perspectives de récolte et situation alimentaire, 45 pays, dont 33 en Afrique ont besoin d’une aide alimentaire extérieure. Un quart de la population africaine, soit 270 millions d’habitants, est en sous-alimentation, selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ces chiffres alarmants sont principalement la conséquence de la guerre en Ukraine qui a commencé le 24 février. Le conflit ukraino-russe a impacté l’approvisionnement des matières premières durant plusieurs mois, plongeant l’Afrique dans une crise alimentaire sans précédent. Elle est en effet dépendante à plus de 85 % des exportations extérieures pour le blé et les céréales dont la majorité proviennent de l’Ukraine. Certains pays africains comme le Kenya ont pour fournisseur mondial l’Ukraine et la Russie pour s’approvisionner en blé, maïs, colza et engrais. Rappelons que les plats traditionnels africains contiennent principalement ces matières premières.
Une triple peine
Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), la guerre en Ukraine profile une catastrophe humanitaire pour l’Afrique et ses pays déjà fragilisés comme la Somalie ou le Soudan. Pour l’association ActionAid, le continent africain connaît une hausse des prix encore plus importante que la moyenne mondiale. Au Zimbabwe, le prix des pâtes a doublé ce qui a contraint de nombreuses familles à se sous-alimenter. En Tunisie, la crise alimentaire est tellement forte « qu’il a fallu revoir tous les programmes alimentaires mis en place l’année précédente pour soutenir leur capacité à faire face à l’explosion des coûts et des entrants agricoles », explique Jean-Bertrand Mothes, responsable de la Division, Fragilité, Crises et Conflits à l’AFD. Dans l’Ouest du continent, 38 millions de personnes ont besoin d’assistance alimentaire et nutritionnelle immédiate en 2022 selon le plan financier RCPCA.
Les conséquences ne sont pas seulement alimentaires. Depuis la guerre en Ukraine on constate une hausse de 12 % du prix carburant. Dans certains pays comme le Zimbabwe, le prix de l’essence a triplé, tout comme le prix du gaz. En plus de l’augmentation du carburant, certaines populations africaines doivent faire face à la corruption et aux conflits armés. Avec la réduction des approvisionnements en matières premières, c’est donc une triple peine qui s’abat sur le continent africain. Et qui ne fait que durcir les conditions de vie des habitants. En mai 2022, les ministères de l’Agriculture des pays du G7 tiraient déjà la sonnette d’alarme sur la situation actuelle. En effet, les problèmes d’approvisionnement alimentaires et la hausse des prix en Afrique suite à la guerre en Ukraine étaient déjà évoqués.
Des solutions pour secourir l’Afrique
Au travers de l’Agence française de développement (AFD), l’État français finance des projets à travers le monde dans des pays pauvres et émergents. En Afrique, elle est implantée dans 54 pays sur 55, seul l’Érythrée n’est pas concernée. Au quotidien, l’AFD aide le continent dans son développement et la construction de ses infrastructures. Afin de mener à bien tous ses projets, elle dispose d’un département de la conformité et des risques pour lutter contre la corruption dans les pays africains. « Elle émet des alertes avant, pendant et après la mise en œuvre des projets. Et travaille pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme », précise Jean-Bertrand Mothes.

L’AFD travaille avec la PAM au Burkina Faso sur un projet de développement qui vise à fournir des repas dans les cantines scolaires aux enfants. Un financement qui s’élève à 10 millions d’euros. Selon le responsable de l’AFD, « travailler en complémentarité avec la PAM est plus pertinent pour nous, car c’est un acteur de référence. Il nous permet de mieux répondre aux failles présentent au Burkina Faso ».
De son côté, la Croix Rouge met en place des solutions intermédiaires pour endiguer cette crise alimentaire. L’un des derniers dispositifs mis en place consiste à donner aux populations une carte de crédit avec un solde de 90 euros par mois. Afin de les aider à acheter des produits de premières nécessités sur les marchés locaux. Si cette solution a été instaurée depuis quelques mois pour faire face aux conséquences de la guerre en Ukraine, ils craignent cependant que cela ne devienne une solution de survie.