Après plusieurs mois de discussions diplomatiques entre le Kremlin et les différents dirigeants du monde, la Russie attaque militairement l’Ukraine. L’ancien pays de l’URSS voulait rejoindre l’OTAN, l’organisation militaire conçue après la deuxième Guerre mondiale afin de s’opposer aux forces du pacte de Varsovie. Pendant ce temps, en Russie, les médias restent muet sur les combats, et se retrouvent limités par le pouvoir.
« Que se passe-t-il vraiment dans les villes ukrainiennes ? Nous pouvons le vérifier en temps réel, loin de l’hystérie des médias occidentaux », explique la présentatrice en début de l’émission du vendredi 25 février, sur la première chaîne de télévision publique russe, Perviy Kanal. Ce journal de la mi-journée est consacré à « l’opération spéciale de défense du Donbass ». Les téléspectateurs n’ont pu voir que deux images furtives de Kiev. L’émission montre ensuite des images de webcams urbaines, la présentatrice ajoute qu’à “Kiev tout est calme, à Soumy, des gens se baladent dans la rue, et à Kharkiv, rien de particulier”. Tandis qu’en réalité ces villes sont bombardées et des combats y ont lieu.
La télévision russe cache les bombardements sur les villes ukrainiennes et justifie les événements comme étant une « opération militaire spéciale », qui est pour eux, une simple routine. En effet, l’idée est de dire que cette opération n’est que la continuité de celle qui se déroule depuis 2014. Les activités qui ont lieu en Ukraine, sont évoqués dans le journal mais étant des « frappes de haute précision », des destructions de matériel ukrainiens, et la conquête de certains territoires. Toutefois, n’est jamais mentionné que sur le territoire, des combats ont lieu. En réalité, sur le terrain, il s’agit d’une guerre qui a déjà fait près de 352 civils morts, selon les autorités ukrainiennes.
Une guerre invisible
La guerre en Ukraine est invisible à Moscou. Les téléspectateurs russes sont renseignés sur ce qui se passe en Ukraine mais pas sur ce qui se passe sur leur territoire. Ces pratiques journalistiques sont bien différentes de celles de l’Occident.
Du côté de Russia 24, ce samedi 25 février, nous parlons dans le journal des nouvelles sanctions financières occidentales à l’encontre de la Russie, sans en préciser la portée. “Ne vous inquiétez pas, on trouvera des solutions et tout ira bien” tente de rassurer Guennadi Ziouganov, le leader du Parti communiste qui était l’invité du journal. A savoir, Guennadi Ziouganov fait partie de l’opposition au pouvoir Russe… Durant le combat, seuls les partis d’opposition soutenant les actions gouvernementales sont autorisés à s’exprimer.
Les médias se retrouvent ultra filtrés par le pouvoir. Ici, certains mots sont interdits, tels que guerre, bombardement de villes ukrainiennes, morts de civils… Les autorités ordonnent de publier uniquement les informations officielles venant du Kremlin. C’est-à-dire qu’il faut uniquement aborder la guerre comme étant “une opération militaire spéciale” destinée au maintien de la paix.
Du côté de la chaîne Rossiya 1, le présentateur veut rassurer les citoyens Russes, en abordant le nucléaire, qui est le plus puissant du monde. Puis, il précise « de quoi garantir la destruction des États-Unis et de tous les pays de l’OTAN » précise le présentateur.
Sur les réseaux, le combat pour la vérité
Cette propagande et ce contrôle de l’opinion publique se propagent aussi sur les réseaux sociaux. Le réseau du groupe Meta, Facebook, ainsi que le réseau social Twitter sont accusés par les autorités Russes de “violation des droits humains”, puisque sont publiés des posts contenants les “mots interdits”, des vidéos montrant la violence de l’armée russe et des appels à manifester. Sachant que toute manifestation est interdite et sanctionnée en Russie. Les utilisateurs du réseau sont alors limités et contrôlés.
Certains comptes de médias tentent de lutter contre cette propagande, Doxa journal, le comité de rédaction de Doxa qui aborde les problèmes de l’université et de l’environnement universitaire moderne, est très actif sur Instagram. Ce groupe indépendant lutte contre la pression des forces de l’ordre russes. Ils ont été bloqués par Roskomnadzor, le service fédéral de supervision des communications, des technologies de l’information et des médias de masse, pour leur texte “Journal de bord pour les pacifistes”. Ce texte debunkait 17 mythes principaux sur la Guerre en Ukraine.
Dojd, un autre média indépendant, qui a été classé “agents à l’étranger” en Russie, a lui aussi été soumis à des menaces de Roskomnadzor. Le média a informé son public que “les forces armées russes tirent sur des villes ukrainiennes”. L’autorité menace le média de restreindre son accès si ces termes ne sont pas supprimés, ainsi que des amendes seront déposées.
L’histoire de la Russie permet de comprendre la situation. Le régime autoritaire et dictatorial du pays est instauré depuis le premier Tsar, Ivan IV le Terrible, en 1547. Toutes les générations russes n’ont connu uniquement que ce type de gouvernance. C’est-à-dire un régime où tous les pouvoirs sont concentrés dans les mains d’un seul homme, le peuple ne peut s’exprimer. Ce qui explique que malgré quelques manifestants, le peuple ne remet pas en question les informations partagées par la télévision. Les paroles de Vladimir Poutine sont très peu remises en cause.