
48 ans après sa dernière et unique participation à la Coupe du Monde, la République Démocratique du Congo (ex-Zaïre) n’a jamais été aussi proche de retrouver les phases de poules de la plus prestigieuse des compétitions internationales. Les Léopards devront se défaire des Lions de l’Atlas du Maroc dans une double-confrontation. Un défi immense, à la hauteur du rêve des 105 millions habitants de la RDC.
« Ali, Bomayé ! » (Ali, Tue le!). Tel était le cri poussé par des millions de zaïrois dans les rues de Kinshasa lorsque Muhammad Ali se préparait à affronter George Foreman, en 1974, dans la capitale du Zaïre, actuel République Démocratique du Congo. Si ce mythique Rumble in The Jungle -remporté par Ali à la 8e reprise- a considérablement mis la lumière sur le pays dirigé à l’époque par Mobutu, la participation des Léopards à la Coupe du Monde a, elle aussi, contribuée à la reconnaissance du Zaïre à l’échelle mondiale en cette année 1974. Forte de son sacre en Coupe d’Afrique des Nations en 1968 et des succès du TP Mazembe et de l’AS Vita Club en Coupe d’Afrique des Clubs Champions, la sélection zaïroise, réussit l’exploit de se qualifier pour le mondial allemand en terrassant le Maroc 3-0 à Kinshasa, lors du tour dernier tour de qualification.
Première nation d’Afrique Noire à atteindre les phases de poules d’une Coupe du Monde, le Zaïre s’offre même le luxe de remporter sa deuxième CAN en mars 74, avant de s’envoler pour l’Allemagne de l’Ouest 3 mois plus tard pour porter les espoirs de tout un continent sur la scène internationale. Arrivés en RFA avec une énorme confiance, les poulains de Mobutu voit vite leur rêve éveillé se transformer en cauchemar. Défaits 2-0 lors de leur premier match face à l’Ecosse, le Zaïre explose ensuite contre la Yougoslavie et enregistre la plus large défaite de l’histoire de la Coupe du Monde, 9-0. Bien que la différence de niveau entre les deux équipes est évidente, ce score fleuve s’explique en grande partie par le manque d’engagement des zaïrois à cause de primes de matchs non versées par le président Mobutu. Héros nationaux quelques mois auparavant, les Léopards quittent le mondial 74 par la petite porte en s’inclinant 3-0 face au Brésil de Rivelino.
Une nouvelle ère
Si le peuple zaïrois a tourné le dos à ses joueurs à leur retour d’Allemagne de l’Ouest, il n’en a pas pour autant perdu sa passion pour le ballon rond. Après plusieurs décennies de déception et d’humiliation sportive, le pays, redevenu République Démocratique du Congo en 1997 après la chute de Mobutu, est de retour sur le devant de la scène au niveau international depuis les années 2010. Demi-finaliste surprise de la CAN 2015, la RDC s’est, depuis cet exploit, fixé un objectif clair et précis : retrouver la Coupe du Monde. Pour y arriver, la fédération congolaise et le ministère des sports se sont lancés une grosse opération séduction de joueurs binationaux formés en France, en Belgique, en Suisse ou même en Angleterre.
La déception de voir des joueurs comme Makélélé, Lukaku, Kimpembe, Mandanda, Ndombele ou Batshuayi évolués dans grandes sélections européennes semble s’effacer petit à petit. Longtemps ignorée par les joueurs née en Europe, le sélection congolaise a su attirer ses dernières années des joueurs tels que Cedric Bakambu, Gael Kakuta, Arthur Masuaku, Marcel Tisserand ou encore Theo Bongonda. Choix du cœur ou choix par défaut, qu’importe, ces binationaux, accompagnés d’anciens joueurs historiques de la sélection comme Dieumerci Mbokani et Yannick Bolasie, se sentent pleinement congolais et prêts à ramener le pays de leurs parents, leur pays en Coupe du Monde, 48 ans après sa dernière participation.
«Vous êtes des héros. Je suis très fier de vous, le peuple congolais est très fier de vous. On est à deux pas de la Coupe du Monde, on doit rester concentré. Je vous promets de vous décorer pour l’honneur, au nom de la République. Alors, ramenez nous cette qualification, vous le pouvez ! », déclarait le président congolais Felix Tshisekedi dans le vestiaire après la victoire contre le Benin qui qualifiait les Léopards pour le dernier tour des éliminatoires. Comme pour le mondial 1974, la République Démocratique du Congo croisera, en mars, la route du Maroc pour valider son billet pour la Coupe du Monde. Guidés par le technicien argentin Hector Cuper, les joueurs congolais ont au bout de leurs pieds l’espoir d’un gigantesque pays au sous-sol richissime où guerres, génocides, corruption et pauvreté ont régné en maitre durant plusieurs décennies. Buteur face à Lens lors de sa première sortie sous le maillot de l’OM, Cedric Bakambu sera plus que jamais l’homme fort d’une équipe qui rêve de réitérer l’exploit de leurs illustres ainés zaïrois.