L’exposition S’élever au milieu des ruines, danser entre les balles de la photographe Maryam Ashrafi dépeint le quotidien des combattantes kurdes au-delà des lignes de front.
Raconter l’histoire de ces guerrières en noir et blanc, c’est la mission de Maryam Ashrafi. Loin d’être une évidence, ce travail s’est dessiné progressivement : “en 2000 mon père quitte l’Iran pour l’Angleterre à cause des tensions politiques. Je l’ai rejoint à 15 ans, et sur place j’ai rencontré des Kurdes…j’ai compris qu’il a pu fuir le pays grâce à eux. Et soudainement, je me suis demandée pourquoi on entendait peu parler de leur situation.” Parmi ces Kurdes, Maryam Ashrafi rencontre des “peshmergas”, qui signifie “ceux qui vont au-devant de la mort”. Des femmes qui prennent leurs armes et se battent au front contre l’Etat islamique.
Ces rencontres marquent la photographe. Elle veut en savoir plus, voir ces combattantes de ses propres yeux. Alors une fois son diplôme de photographie documentaire en poche elle part, direction le Kurdistan iranien : “j’ai rencontré celles qui luttent chaque jour, j’ai découvert leur quotidien et leur combat”…et ce qui devait être un court séjour devient un travail de longue haleine :”j’ai compris que c’est plus qu’une guerre menée en Iran. C’est un enjeu que vivent des femmes aussi en Syrie et en Turquie.“ Maryam Ashrafi décide de montrer au monde ces visages, ces moments de lutte…et ces moments de vie une fois le front quitté. “Ce sont des femmes qui ressentent des émotions comme chacun d’entre nous. Leur vie ne se résume pas qu’à la bataille. Dans les médias, les photographes se focalisent uniquement sur les moments de guerre. Moi, j’ai décidé de faire un sujet social.”
Kobané. 2014. Les combattantes s’illustrent alors et gagnent en visibilité aux quatre coins du globe…mais sont toujours représentées de la même manière : jeunes, belles, et armes à la main. “Il faut dépasser cette image” explique Maryam Ashrafi “je comprends cette représentation, il faut arriver à toucher l’opinion publique. Mais ces femmes ne se résument pas qu’à cela. Quand les kalachnikovs se taisent elles œuvrent à la mise en place d’une société. Ce sont des leaders.”
Aux images de guerrières se mêlent des moments de vie. Un enterrement, une combattante observant le paysage par-delà les ruines, des sourires, aussi. “Je me demande toujours si j’arrive à transmettre l’instant vécu. C’est le challenge du photographe. J’espère que les images resteront en mémoire de celles et ceux qui les verront. Les visiteurs doivent comprendre que derrière les armes se cache une existence collective.”