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Médias 0 carbone : Juger à froid, agir à chaud

Dans les médias, le mouvement écologique s’accentue face à l’urgence climatique. Le terme de « média 0 carbone » prend de l’ampleur dans le milieu de l’audiovisuel comme dans la presse écrite. Les médias espèrent réduire de 30% les émissions carbone d’ici 2030. 

Plus un journal papier est lu et circule, moins il émet de CO2. Il est imprimé, distribué et ensuite recyclé. 95 % du papier d’un quotidien est réutilisé en moyenne sept fois. À l’inverse, la facture verte de sa version numérique augmente en fonction du temps de lecture et de l’impression ou non des articles. La coupe des arbres peut être utilisée pour aider à régénérer des espèces dans certaines forêts ceux qui peut entraîner une augmentation de la diversité des plantes vasculaires. La production de papier en Europe de l’Est est passée de 12 millions de tonnes à 3 millions en 20 ans. Dans la presse papier, le papier recyclé représente 40 à 60% de papier utilisé. D’ici 2023, l’objectif est de parvenir à 90% de papier recyclé.

Les journalistes ont personnellement un rôle à jouer dans cette ascension pour (reformuler) devenir un média 0 carbone. En particulier lorsque cela concerne les déplacements professionnels, en privilégiant par exemple le vélo pour les trajets courts. Aude Carasco, journaliste médias à la Croix effectue ses trajets en VTC dans Paris pour ces reportages : « Je me suis rendue compte que les vélos ou même mes jambes faisaient l’affaire ». En mettant l’urgence climatique en avant, les journalistes donnent l’exemple en changeant leur mode de vie. 

Avoir à sa disposition un outil de mesure permet d’agir. C’est le cas de la calculette carbone, développée par l’entreprise EcoGraf, qui permet d’évaluer en quelques clics les émissions de gaz à effet de serre liées à un voyage. Plusieurs médias le recommandent pour les déplacements de leurs journalistes. Pour la presse papier, la plupart des émissions carbones proviennent de l’imprimé, même si des efforts ont été faits pour contribuer à développer les forêts au lieu de les détruire. L’usine de l’entreprise Golbey, dans les Vosges, imprime uniquement sur du papier écoresponsable et a pu ainsi augmenter son chiffre d’affaires de 30%. Le point négatif est le transport de cette marchandise qui est majoritairement effectué par des camions consommant du diesel. 

Le vocabulaire change également, les médias ne parlent plus de réchauffement ou de changement mais de dérèglement ou d’urgence climatique. Une enquête de 2012 « L’empreinte carbone du secteur de l’édition » menée par l’Association Mondiale des journaux et des éditeurs de médias d’information (WAN-IFRA) montre que la lecture d’un magazine sur support papier ou numérique présente des bilans carbones similaires mais aussi variables en fonction du nombre de papier ou du temps de lecture. 

Le journal papier, beaucoup plus consommateur d’énergie au stade de sa production, a l’avantage d’émettre une empreinte carbone unique. Une fois imprimé, il peut se conserver et surtout se partager. À la différence de la presse numérique, où les articles téléchargés empruntent à chaque nouvelle lecture un réseau utilisant de l’énergie pour être acheminés jusqu’à nos ordinateurs, tablettes ou smartphones.

Journalistes : acteurs du changement

Benoit Moreau, président de l’entreprise EcoGraf dit avoir eu le déclic : « Avant on parlait d’évaluer les déchets, maintenant il faut les réduire. La force de l’imprimé par rapport au numérique est que l’on sait mesurer son empreinte carbone ». Une obligation actée aux Accords de Paris, avec un objectif de moins de 5% chaque année d’émission de CO2. Sa société a ainsi calculé qu’un quotidien régional émettait au numéro, en moyenne, 200 grammes d’équivalent CO2 sur son cycle de vie, soit l’envoi d’une dizaine de courriels. De l’autre côté de l’Atlantique, une étude similaire a évalué l’impact sur l’environnement du National Geographic à 820 grammes d’équivalent CO2 par exemplaire, soit ce que parcourt une voiture sur trois kilomètres.

La chaîne TF1 a effectué son bilan carbone en 2007, au moment où le débat sur l’urgence climatique commençait à émerger. Les journalistes sont dans cette entreprise les premiers acteurs du climat, or la communication est aussi importante. Pourtant, elle fut l’une des dernières à avoir pris conscience de l’urgence climatique. « Nous regardions ailleurs depuis plusieurs années » assume Gérald Holubowicz, communicant chez TF1. « Il n’y aura pas de changement sans l’aide de la communication » affirme-t-il. Notamment avec les publicités diffusées, Christelle Leroy responsable sociétale de l’entreprise (RSE) du même groupe est fière de l’éthique que TF1 a adopté ces dernières années : « si l’entreprise le Chat demande notre avis sur la diffusion d’un produit, nous appuierons la lessive écologique plutôt qu’une autre ».

Les médias vont dans la bonne direction pour limiter leurs empreintes carbones. Dès janvier 2022, grâce à la loi contre le gaspillage, il sera interdit d’utiliser des emballages plastiques pour la presse expédiée. L’interdiction des encres d’impression à bases d’huiles minérales sera actée en 2025, elles seront remplacées par des matières d’origines végétales. 

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Je suis une étudiante de troisième année en journalisme à l'ISCPA Paris. J'aime traiter des sujets politiques, sportif et culturels.

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