Entre les crises sanitaires et climatiques actuelles, l’environnement est un sujet majeur pour la génération à venir. Malgré un manque d’intérêt notable des jeunes envers ces enjeux, la presse jeunesse devrait continuer à se développer dans les années à venir.
« Parler de climat n’intéresse pas forcément les jeunes », constate Juliette Loiseau, journaliste et cheffe de rubrique pour Le Monde des Ados. Curieusement, les chiffres montrent l’inverse. Alors qu’en 2019 le taux d’abonnement s’élève à 13 % pour la presse quotidienne nationale, ce pourcentage bondit à 85 % pour la presse jeunesse. Pour le magazine Okapi, du groupe Bayard, l’abonnement représente même 95 % des ventes.
« Nos ouvrages sont présents dans la majorité des Centres de Documentation et d’Information dans les écoles de France. C’est une très bonne chose », s’exclame David Groison, directeur des titres ados pour Bayard Jeunesse. « Il faut aussi avoir en tête qu’en une semaine, la plupart des collégiens passent plus de temps sur leurs écrans qu’à l’école », souligne le journaliste. Mais il est intéressant de rappeler que nombreux sont ceux qui s’informent grâce aux réseaux sociaux. Un jeune sur deux suit avec intérêt l’actualité. « Je ne lis jamais la presse. Mais j’adore être au courant et comprendre ce qui se passe dans le monde. Et pour ça, je vais sur TikTok », assure Victor, élève de troisième venu aux Assises du journalisme de Tours avec sa classe. « Bien sûr, je fais attention à ce que je vois, on a appris à vérifier les sources des informations », précise le futur lycéen qui ne se sent « pas forcément concerné » par la thématique de ces Assises du journalisme sur le climat.
La jeunesse partiellement intéressée par ces sujets
Alors d’où vient ce manque d’intérêt pour les sujets environnementaux ? Pour Maxime Parola, professeur agrégé de SVT, l’enseignement en est l’une des raisons principales : « Pour que les élèves soient d’avantages intéressés, il faudrait changer certaines thématiques, angler les cours avec des sujets plus concrets », relate le scientifique. « Puis, pour comprendre vraiment les enjeux, il faut choisir la spécialisation SVT en terminale, sinon, les sujets ne sont que partiellement abordés, d’où le manque de connaissances », ajoute-t-il.
De nombreux journalistes de la presse jeunesse se rendent dans les collèges pour parler du traitement de l’environnement dans les médias. « Je pensais que les jeunes élèves se sentaient majoritairement concernés par les enjeux écologiques. Mais je me suis rapidement rendu compte que beaucoup en avait marre d’entendre parler de certaines personnalités engagées », raconte Raphaèle Botte, rédactrice en chef du magazine Dong.
Mais malgré ça, certains jeunes s’y intéressent et comprennent les enjeux environnementaux actuels, comme le reconnait Maxime Parola : « Il y a tout de même une évolution. Aujourd’hui, quelques élèves se sentent concernés, alors que ce n’était vraiment pas le cas il y a 20 ans ».
L’objectif est donc d’éduquer à la complexité. « Nous recevons de plus en plus de questions très pertinentes de jeunes lecteurs », confie Malicia Mai Van Can, directrice éditoriale des magazines 1jour1actu, Wapiti, Géo Ado, Julie et Curionautes. « Ils s’y connaissent parfois sans doute mieux que leurs parents », s’amuse la journaliste. Et il y a peut-être un coup à jouer dans ce sens-là. En cherchant à se développer, la presse jeunesse espère aussi s’élargir et explorer un nouveau public. « Je rêve de travailler sur des nouveaux projets avec des journalistes pour toucher les adultes », livre David Groison. Le journaliste avait d’ailleurs lancé un concours en partenariat avec l’Education Nationale en décernant un prix au meilleur « éco-délégué » d’un collège.
Les journalistes de la presse jeunesse sont persuadés d’une même chose : les médias traditionnels devraient proposer des formats « plus accessibles » tels que des BD, des posters ou des cartes mentales pour informer différemment. « Si certains médias expliquaient avec plus de pédagogie le fonctionnement des vaccins par exemple, plus de gens auraient compris son utilité », plaisante Maxime Parola.
L’autre projet de la presse jeunesse est de rendre les magazines encore plus écologiques pour sensibiliser d’avantage les lecteurs. Il faudrait utiliser de l’encre végétal et remplacer les enveloppes en plastique par du papier. Mais comme le rappelle David Groison, « tout cela a un coût ».