Moins intéressés par l’actualité et méfiants envers les médias, les jeunes s’informent surtout différemment. Plus présents et vigilants sur les réseaux sociaux, ils sont néanmoins plus conscients des « fakes news » que leurs ainés. Le CLEMI *(encadré), intervient dans les écoles, collèges, lycées pour tenter de limiter la propagation de ce phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur.
Aujourd’hui un jeune sur deux suit avec intérêt l’actualité. Baptiste, collégien en Seine-Saint-Denis, est élève en 3ème il a notamment participé au concours Médiatiks organisé par le CLEMI. Il prête très peu attention à la radio sur laquelle s’informent ses parents. Il préfère lui lire la presse sur son téléphone. Le soir, il lui arrive de zapper sur des chaînes d’information en période de grosse actualité. « Tout se passe sur mon téléphone, que ce soit sur Tik-Tok, Instagram ou Twitter. Je lis beaucoup de posts, des articles courts ou je regarde des vidéos comme celles de Brut ou Konbini ». Lorsqu’une information l’intéresse il n’hésite pas à faire ses propres recherches en allant voir ce qu’en disent les médias. Baptiste illustre parfaitement le portrait-type du consommateur de médias de 16 ans. Selon un baromètre de confiance dans les médias Kantar/Onepoint pour La Croix. Comme les trois-quarts (76 %, selon le Baromètre) des 16/24 ans, ils s’informent sur Internet et quasi-exclusivement sur leur smartphone. Les réseaux sociaux (à 46 % des 18/24 ans) sont leur mode d’accès principal à l’information, devant la presse écrite en ligne (31 %), les sites audiovisuels (10 %) ou les « pure playeurs » comme Médiapart (8 %). Un constat partagé par Séverin Ledru-Milon enseignant d’histoire géographie depuis 2009 et référent au CLEMI depuis 2016. Au contact quotidien des élèves il évalue la relation des jeunes vis-à-vis des médias : « J’ai rarement eu d’élèves qui étaient acteurs de leur manière de s’informer. Pour moi, ils s’informent surtout par les réseaux sociaux, par les liens partagés par les proches ou par les propositions des algorithmes ».
Le tournant de 2015
Elodie Gautier, déléguée académique à l’EMI (Éducation aux Médias et à l’Information) est en charge du CLEMI dans l’académie de Créteil depuis 10 ans. Elle a pu vivre différentes expériences au fil des années qui ont impacté à la fois les enseignants et les élèves : « L’engagement des enseignants dans l’EMI a toujours été fort. Ils et elles se sont de longue date impliqué.e.s dans la création et l’accompagnement de média scolaires. Cependant, pour l’EMI, les attentats de 2015 ont marqué un tournant. Ils ont révélé la fragilité d’un principe fondateur de la démocratie : la liberté d’expression. La généralisation des usages des réseaux sociaux, la viralité des infox et récits complotistes ont amené à une prise de conscience ». Elodie Gautier sait pertinemment que la montée en puissance des réseaux et des fakes news influent sur les jeunes mais elle émet tout de même une réserve : « Les jeunes comme le reste des usagers progressent dans leurs pratiques et de nombreuses études montrent qu’ils sont conscients que le meilleur comme le pire est accessible sur le web et les réseaux sociaux. Ils savent aujourd’hui que les infox sont plus largement et plus rapidement partagés parce qu’elles jouent sur l’affect. Mais les premiers usages des adolescents ne concernent pas en premier lieu l’information d’actualité. Ils utilisent principalement les RSN (Réseaux Sociaux Numériques) pour communiquer entre eux ou pour leurs loisirs, la musique, les jeux… Ils sont aussi capables d’usages créatifs et raisonnés. Ce qui est aujourd’hui une préoccupation concernant les usages des jeunes, c’est la question du respect de l’autre et de soi-même. Des questions qui sont au cœur des phénomènes du cyber harcèlement ». Le CLEMI joue donc un rôle primordial envers ces jeunes qui seront eux aussi des prochains électeurs.
Le CLEMI (Centre de Liaison pour l’éducation aux médias et à l’information) est chargé de l’éducation aux médias et à l’information dans l’ensemble du système éducatif français.Fort d’un ancrage historique dans la communauté enseignante et de partenariats solides avec les médias depuis plus de 30 ans, ses missions s’organisent autour de plusieurs axes : la formation des enseignants (du 1er et du 2nd degrés, de toute discipline) et des formateurs / éducateurs ;
la production et la diffusion de ressources pour accompagner les actions auprès des élèves, de la maternelle au lycée ;
Actions d’éducation aux médias et à l’information à destination des familles (guide, kit d’ateliers, série TV…de la Famille Tout-Écran) ;
le conseil et l’expertise, en France et à l’international ;
l’organisation d’événements, dispositifs et concours d’éducation aux médias et à l’information (Semaine de la presse et des médias dans l’École, productions de médias scolaires – Médiatiks, #ZéroCliché, Wikiconcour Lycéen…) ;l’animation du réseau des coordonnateurs académiques.
Zidane Azzouzi