Pour une grande partie des musulmans du monde, le ramadan risque de se célébrer en confinement. En France, les lieux de culte sont fermés, il faudra donc jeûner et prier à la maison, quitte à partager des moments grâce aux écrans.
Le ramadan qui débute ce vendredi 24 avril, aura une saveur particulière. Les mesures sanitaires liées au confinement font que la rupture du jeûne ne pourra se faire avec toute la famille ou entre amis, mais avec uniquement avec son cercle proche. Les prières habituellement organisées à la mosquée seront faites chez soi, certains imams proposeront des rassemblements en visioconférence.
L’Imam de la mosquée de Raismes dans la région Hauts-de-France, explique les particularités du ramadan de cette année : « Que les croyants soient chez eux, à la mosquée ou dans leur lieu de travail, cela ne change rien au niveau du jeûne. En revanche pour la rupture, il va forcément y avoir une adaptation, il va devoir être restreint au petit cercle familial et non plus avec la grande famille ou bien en communauté dans une salle de prière. »
Concernant ces dernières, il affirme que la prière nocturne, d’habitude pratiquée en lieu de culte, sera effectuée en famille, chez soi. Il ajoute : « Nous n’organisons rien pour faire une prière de groupe ‘virtuelle’, en revanche nous diffusons les discours, les sermons, les exhortations qui se faisaient dans les lieux de culte, sur les réseaux sociaux. Je viens de terminer un discours, j’étais en direct sur la page Facebook de la mosquée de Raismes. Ce sera pareil chaque soir, c’est une façon de rester en contact avec nos fidèles. »
Aide aux plus pauvres
En cette période, les mosquées distribuent d’habitude des repas aux plus défavorisés leur permettant de survivre pour ce mois spécial. Mais confinement oblige, ces distributions ne peuvent avoir lieu. Alors pour ne pas laisser seuls, sans aide, les plus démunis certains ont pris les devants. L’imam de Raismes explique : « Il y a beaucoup de cagnottes en ligne qui ont été mises en place, par de nombreuses associations humanitaires, caritatives ou cultuelles. D’habitude, chaque vendredi nous accueillons une association et nous faisons une collecte d’argent mais comme ce n’est plus possible nous invitons à présent nos fidèles à se rendre directement aux permanences des associations, afin de leur apporter des produits alimentaires et d’hygiène. »
Ces dernières semaines « d’autres initiatives ont été prises pour venir en aide aux personnels soignants, nous avons aidé l’Ehpad de Raismes, en offrant des masques et des gels hydroalcooliques par exemple. »
De nombreuses mosquées vivent en grande partie grâce aux quêtes et aux dons : ce sont les mosquées autofinancées, qui ne dépendent pas de pays étrangers. C’est le cas de la mosquée de Raismes. Sans quêtes ni dons lors du ramadan certaines mosquées risquent d’être confrontées à des problèmes financiers. L’imam développe : « Nous n’avons actuellement pas de problème de financements car nous avons mis en place un système de prélèvement pour l’association chaque mois. Mais les mosquées ne bénéficiant pas de ce système en ligne observent déjà quelques difficultés. »
Il ajoute que le rôle des religieux est encore plus important dans la période que nous traversons : « Notre rôle est d’aider les gens psychologiquement, surtout dans les moments de tension et d’interrogation, comme celui que nous vivons actuellement. Nous sommes là aussi pour apaiser le cœur des gens et les rattacher à leur seigneur. »
Il n’y a pas qu’en France que la solidarité s’organise pour le ramadan. Hervé Dubois, président de l’ONG LIFE, œuvre auprès des populations des pays pauvres et en conflits. Son objectif : faciliter l’accès à l’eau potable et distribuer de la nourriture : « Pour le ramadan, on distribue dans 11 pays des kits alimentaires familiaux pendant tout le mois de jeûne. On cible les familles les plus vulnérables pour qu’elles aient au moins un repas décent lors de la rupture du jeûne. »
Bien que les dons affluent toute l’année, ils sont particulièrement importants en période de ramadan : « Pour que ces produits soient bien acheminés, nous sommes contraints d’assurer une traçabilité de ces dons. »
Face à la crise sanitaire, l’ONG a été contrainte de revoir toute sa logistique pour assurer la distribution des produits alimentaires. Très vite, les gestes barrières ont été adoptés : le don des denrées ne se fait plus par centaine mais par « petit groupe, ou individuellement ». Une année qui sera quelque peu particulière pour l’ONG.