Un éventail de stratégies pour réussir le déconfinement du 11 mai sont actuellement à l’étude. La méthode du ‘Stop and Go’ a été soulevée mais suscite des interrogations au sein de la communauté scientifique.
La porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye l’a évoqué mercredi dans les colonnes du Monde : la stratégie du ‘stop and go’ « fait partie des hypothèses » étudiées par le gouvernement pour l’après-confinement. Cette méthode consiste en une « alternance de phases de déconfinement et restrictions fortes », informe David Trouchaud, infectiologue en Normandie. L’objectif est double : atteindre à terme l’immunité de groupe, par les contacts répétés, tout en permettant une reprise progressive de l’activité.
Théorisée par l’épidémiologiste britannique Neil Ferguson, conseil de 10 Downing Street, la théorie divise au sein de la communauté scientifique. David Trouchaud est un défenseur de la doctrine prônée par l’Exécutif : « Je suis conscient que c’est une stratégie de transition, mais elle peut se révéler efficace. L’idée est de reconfiner la population dès qu’un un plafond hebdomadaire de patients entrant en réanimation est atteint. On pourrait penser à un chiffre avoisinant les 600, sachant qu’actuellement ce total s’élève à 3 000 dans l’Hexagone. »
L’écueil est connu : une deuxième vague d’épidémie. « La thèse de la deuxième vague ne fait pas consensus au sein de la communauté scientifique. Certains estiment qu’elle est inéluctable, car les gestes barrières et la distanciation sociale ne pourront être respectés durablement. D’autres jugent que le virus est mésophile, c’est-à-dire qu’il prospère dans des conditions de température modérée. Ainsi, la chaleur pourrait éradiquer sa propagation. » Dans ce cas-là, « la stratégie du ‘stop and go’ serait saisonnière. Les périodes de confinement pourraient ressurgir au printemps et en automne », affirme-t-il.
Le RO, la pierre angulaire de l’épidémie
David Trouchaud juge les conditions optimales pour la mise en place du ‘Stop and Go’ : « Le confinement a eu l’effet escompté : on constate une baisse drastique du R0 (nombre de personnes moyennes contaminées par un porteur du virus). Il ne s’élèverait désormais qu’à 0,5, alors qu’il se situait aux alentours de de 3,5 ou 4 en France avant le confinement généralisé. C’est une chute significative de près de 85%. »
L’infectiologue entrevoit la suite des événements avec une certaine sérénité : « Ce taux de reproduction de la maladie inférieur à 1 induit un infléchissement de la courbe, et conduira à moyen terme à l’extinction de l’épidémie. » Le ‘Stop and Go’ doit permettre, en premier lieu, de profiter d’une accalmie : « Au moment du relâchement partiel du confinement, le 11 mai, on aura une marge de manœuvre grâce aux résultats positifs du confinement. Le ‘Stop and Go’ nous permettra de réguler le RO, le laisser remonter légèrement en-dessous de 1. Mais il faudra être attentif pour qu’il ne dépasse pas ce seuil et que l’épidémie ne connaisse une recrudescence massive. » La stratégie préconisée par le gouvernement requiert ainsi une minutie de tous les instants : « C’est tout le principe du ‘Stop and Go’ : une régulation réfléchie et raisonnée du RO », conclut-il.
Emmanuel Piednoir, épidémiologiste, se montre de son côté dubitatif : « Le ‘Stop and Go’ peut se révéler risqué. Le gouvernement prendrait le risque d’exposer la population à une deuxième vague d’épidémie, et par conséquent à une nouvelle saturation des services hospitaliers. Cela s’apparente à de l’inconscience politique. »
Cependant, il estime lui aussi que la valeur du RO est la clé de la sortie de crise : « Si le RO grimpe trop rapidement, la courbe de contamination sera de nouveau exponentielle, comme au début de l’épidémie. » A ses yeux la clé de résolution de l’équation est la suivante : « Pour effectuer un déconfinement efficace, il faut un prérequis : un dépistage massif sur la population. Cette thèse a été martelée par l’Exécutif, mais n’est pas appliqué dans les faits. Les individus sains seront alors autorisés à sortir, tout en conservant les gestes barrières. Le déconfinement sera alors graduel, et la courbe s’aplatira. »
Le directeur général de la Santé Jérôme Salomon l’a de nouveau martelé jeudi : « Le but est de gagner du temps jusqu’à ce qu’un traitement ou un vaccin arrive. »
Selon la théorie du ‘Stop and Go’, sept périodes de confinement seraient nécessaires avant l’éradication du virus. Le temps ne devrait pas représenter une denrée rare.
Etudiant en journalisme à l'ISCPA, je suis à la recherche d'un stage de trois mois au sein d'une rédaction de presse française ou espagnole.