
A l’heure où le monde ne peut plus se passer des satellites, les ingénieurs et scientifiques doivent poursuivre leurs observations et leurs interventions malgré la crise sanitaire.
Le Covid-19 n’a malheureusement pas épargné les ingénieurs de l’Agence spatiale européenne (ESA- European Spatial Agency). Pendant une période de deux semaines avant Pâques, plusieurs des missions du système solaire du programme scientifique de l’ESA ont dû être mises en veille prolongée en raison d’un cas de Covid-19 dans une des salles de contrôle. L’ESA se veut rassurante : « Toutes les activités liées à l’ingénierie électromécanique nécessitant une présence sur site ont été réduites à des éléments absolument nécessaires à la planification. Le personnel travaille principalement à distance et pour ceux qui doivent être présents sur nos sites, des mesures très prudentes ont été mises en place. Les gens portent des masques et respectent la distance sociale. »
Le CNES (Centre national d’études Spatiales), a pris la décision de suspendre les activités de préparation des lancements, ainsi que la réalisation des chantiers en cours au Centre spatial guyanais (CSG). Dès le 3 mars, la direction du Centre spatial en Guyane avait pris des mesures de précaution : la fermeture des sites d’observation pour les lancements, ou encore la suspension des visites touristiques du site. Mais une opération en particulier doit se poursuivre : l’observation et l’anticipation des collisions des satellites. Notre planète est entourée de milliers de fragments de débris spatiaux créés par des satellites disparus ou lors de collisions et d’explosions précédentes. Les engins spatiaux sont donc exposés à tout un spectre de menaces. Tout d’abord, des menaces naturelles en raison de leur environnement, artificielles causées l’augmentation constante du nombre de de débris et leur caractère incontrôlable, et enfin volontaires comme les tirs anti-satellites par les Etats-Unis et la Chine. « Nous considérons la surveillance continue de toute collision potentielle et la réalisation de manœuvres pour éviter ces collisions, l’une de nos plus hautes priorités », explique Holger Krag, responsable de la sécurité spatiale à ESA (European Spatial Agency). L’agence poursuit : « heureusement, minimiser le nombre de personnes sur le site ne signifie pas minimiser les opérations. Les rapprochements entre vaisseaux spatiaux et débris continueront d’être surveillées, et si des mesures sont nécessaires, nous serons prêts à agir. »
Des débris et encore des débris
Il est impossible d’agir sans le support des satellites. « Nos systèmes de télécommunications en dépendent, tout comme le fonctionnement de nos applications, les systèmes GPS, la météo, les transferts financiers…les satellites sont essentiels, y compris au niveau militaire », déclare Vincent Aquilina, analyste en géopolitique spatiale et lauréate du prix René Mouchotte remis par l’armée de l’air. Cette dépendance est gérée en France par le CNES, le commandement de l’espace (un organe de l’armée de l’Air), et de l’Agence spatiale européenne. En 2017, d’après le CNES, plus de 30 000 objets d’au moins dix cm (dont 1 400 seraient des satellites) sont actifs. D’ailleurs, 750 000 objets d’un centimètre et 135 millions d’objets d’un millimètre voltigent en orbite autour de la Terre. Les satellites en orbite terrestre, volent comme sur des « autoroutes spatiales », et doivent être continuellement protégés. Des manœuvres détournent les engins spatiaux sur une orbite sûre, sans qu’ils n’entrent en collision avec des satellites ou des débris qui fonctionnent ou non. Tout au long de l’épidémie de coronavirus, le travail de protection des missions spatiales européennes se poursuivra, car Vincent Aquilina explique que « le phénomène s’accroît de lui-même. Il s’agit du syndrome de Kessler : un débris en provoque deux puis quatre puis six … ». Des centaines d’alertes sont émises chaque semaine pour un satellite en orbite terrestre basse. Dans une majorité des cas, le risque de collision diminue au fil du temps et de plus en plus d’informations sont recueillies sur les orbites des objets en danger. Si certains débris finissent par retomber sur Terre, la plupart d’entre eux se vaporise lors de leur rentrée atmosphérique. Mais 10 à 20 % arrivent à la surface du globe. De nombreuses heures sont nécessaires afin d’analyser la probabilité de collision : la distance entre les deux objets, leurs positions probables dans le futur, les incertitudes dans les observations et dans les calculs. Lorsqu’un satellite semble s’approcher trop près d’un autre objet, les équipes de mission envoient les commandes pour l’éliminer. Impossible donc, de mettre en veille la surveillance du ciel.
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