Politique

Amazon, la victoire syndicale

La justice française a sommé mardi 14 avril le géant du commerce en ligne de ne vendre que les produits de première nécessité. Amazon France a donc décidé de fermer provisoirement ses entrepôts : pour le meilleur et pour le pire.

Les syndicats ont fièrement salué leur victoire unanime, en apprenant la décision de la justice à l’égard de la société Amazon France. Une annonce qui intervient à la suite de plusieurs semaines de lourdes heures de travail, réalisées par les salariés, dans des conditions parfois affligeantes. Le Tribunal de Nanterre a ordonné à la société de limiter ses livraisons aux seuls produits essentiels, sous peine d’une amende d’un million d’euro par infraction. Le PDG, Frédéric Duval, a de ce fait annoncé la fermeture de six entrepôts durant cinq jours, du 16 au 21 avril. « C’est ce que nous avions demandé au tribunal à titre principal », a indiqué le syndicat Sud solidaire, à l’origine de la plainte. 

Dans ce contexte épidémique, selon les syndicats, la société ne se soucie pas de la protection de ses équipes. Inès Gourat, déléguée syndicale CFDT de l’entrepôt de Sevrey (Bourgogne-Franche-Comté), le certifie : « Il y a seulement deux semaines et demie, nous avons reçu des gants en latex et des masques, alors que ça faisait un moment que nous en demandions. » Le confinement en France a commencé le 17 mars. Les employés disposaient jusque-là de gants anti-coupures réutilisables pour certaines manipulations. 

Bien que certaines modalités aient été mises en place, Inès affirme que ce n’est pas suffisant pour la santé des salariés. Elle évoque des outils de travail, scanners et bacs, glissant d’une main à l’autre, qui ne peuvent être désinfectés à chaque rotation : « Certains ont la boule au ventre avant d’aller travailler, par peur d’attraper le virus et de contaminer leur famille. » Elle signale également la « pression permanente » exercée sur les salariés par la direction, qui vérifie le bon respect des gestes barrière, à longueur de journée. 

De son côté, Laurent Degousée, co-délégué de la Fédération Sud commerce, rattaché à l’Union syndicale solidaires, l’exprime durement : « Nous avons une seule obsession, c’est d’éviter la mort. » Les salariés sont pourtant contraints de porter des colis de 25 kilos, et pour cela, ils ont besoin d’être à deux. La proximité étant la principale raison de propagation du virus. Arnaud Chemain, secrétaire fédéral de la CGT commerce et service l’assure : « Beaucoup ont contracté le virus. Amazon a déclaré qu’il n’y en avait que dix, alors que nous les avons évalué à une centaine. » 

Restructuration des entrepôts  

Durant ces cinq jours, Inès Gourat explique que l’entrepôt de Sevrey ne sera pas totalement fermé, puisque l’équipe RH, les managers, la sécurité ainsi que les équipes de maintenance et d’informatique seront sur place. Une réunion est dans ce même sens prévue jeudi 16 avril entre la direction et les élus : « Il s’agira de faire en sorte de trouver des points critiques auxquels la direction ne peut trouver de solutions. » Elle assure vouloir prolonger les cinq jours au maximum, afin que les salariés soient eux aussi assignés à résidence. Laurent Degousée, lui, le souligne : « Notre objectif est qu’il y ait déjà un effet sur le court terme et aussi sur les autres pays. » 

Durant la fermeture temporaire de ses entrepôts, le géant du e-commerce s’engage à nettoyer et évaluer les risques concernant le virus. La direction maintiendra la rémunération à 100% de ses salariés, au nombre de 6500 en contrat à durée indéterminée (CDI) et 3600 en intérim. 

Arnaud Chemain estime que les mesures prises par Amazon arrivent un peu tard : « Il y aura forcément des dommages. Nous aurons de mauvaises nouvelles concernant la santé des salariés. »  Il déplore déjà le décès de plusieurs d’entre eux dont un intérimaire de Bretigny-sur-Orge. Après avoir obtenu cette première victoire, il rappelle que « l’ambition principale est de préserver les droits fondamentaux des salariés. »  De cette crise sanitaire, il espère voir émerger des avancées sociales et une nouvelle société de consommation.

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Diplômée d’un DUT information-communication, je poursuis mes études en deuxième année de journalisme.

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