L’hébergement de malades atteints du Covid-19 dans les hôtels fait débat en France. Le dispositif a pourtant largement été mis en place à l’étranger.
Faut-il isoler les personnes testées positif au Covid-19 dans des hôtels ? Ce dispositif présente deux atouts majeurs. D’une part, il permet de désengorger les services de réanimation. D’autre part, cela permet de limiter le risque que les patients sortant d’hôpitaux ne contaminent leurs proches. Utilisé en premier lieu en Chine pour placer en quatorzaine les voyageurs étrangers, puis en France pour isoler les Français revenant de Chine, le dispositif a longtemps été mis en avant et l’est toujours à l’étranger. Or, en France, la mise à l’isolement des malades atteints de Covid-19 dans des hôtels reste rare. Comment l’expliquer ?
Dès le 2 avril, le Conseil scientifique évoquait la nécessité de mettre en place « des modalités d’isolement des cas et de leurs contacts adaptés au contexte personnel avant d’envisager le déconfinement. » Pourquoi l’exécutif n’a-t-il pas appliqué aussitôt cette recommandation ? Est-ce faute de moyens ? À l’évidence non, puisque le Groupement national des chaînes hôtelières (GNC) évaluait il y a plus de trois semaines que 1 000 hôtels et 40 000 chambres peuvent être mis à disposition des préfets et des Agences régionales de santé (ARS), pour recevoir des malades « sans gravité ».
Les avis à propos du dispositif divergent
Dans un communiqué diffusé vendredi 10 avril, l’Académie nationale de médecine a considéré que « les recommandations actuelles, qui préconisent pour les patients ayant une forme peu grave de Covid-19 un confinement strict à domicile, avec l’application de mesures barrières comme seule protection de l’entourage », ne suffisaient pas. En avançant un argument de taille : « L’expérience montre qu’il est extrêmement difficile de respecter ces consignes pendant la durée nécessaire dans un espace domiciliaire restreint, quand les personnes qui y vivent sont nombreuses ou présentent des facteurs de risque. »
Le lendemain, interrogé à ce sujet, le directeur général de la santé Jérôme Salomon a jugé que l’isolement des malades dans les hôtels n’était à l’heure actuelle pas « un besoin particulier. » Les discours opposés des deux instances de santé freinent les initiatives des préfets, lesquels ont la possibilité de réquisitionner des ERP (Etablissement recevant du public) grâce à un arrêté du Journal officiel du 29 mars.
Le préfet des Pyrénées orientales, Philippe Chopin, est le seul à avoir mis en place le dispositif. Le 26 mars, il a réquisitionné un hôtel à Perpignan afin d’accueillir des malades en phase de guérison. L’initiative est malheureusement isolée. Jean-Virgile Crance, président du GNC, constate : « Pour l’instant, on n’a pas de demande en volumétrie importante de la part des préfets mais nous y sommes prêts. »
Les dirigeants de grands groupes hôteliers se disent également favorables à la mise en place du dispositif. Une porte-parole du géant français Accor assure : « Depuis plusieurs semaines, nous avons dit au gouvernement français, aux autorités de santé et aussi à la maire de Paris, que nous étions prêts à ouvrir une chambre pour des malades. »
Un dispositif largement mis en œuvre à l’étranger
Le manque de volonté politique se heurte certainement à la bienveillance des hôteliers. Celui-ci semble pourtant être propre à la France. Car le dispositif est bien plus largement utilisé à l’étranger. Chez notre voisin italien, ceux qui ne peuvent pas s’isoler à domicile sont envoyés dans des hôtels réquisitionnés. À New York, foyer de l’épidémie aux Etats-Unis, l’agence Bloomberg a rapporté l’installation de patients dans des hôtels de ville. En Tunisie, trois hôtels ont été réquisitionnés, abritant actuellement 120 malades.
Selon l’avis de certains experts, la phase de déconfinement, prévue à partir du 11 mai, ne pourra être effective et efficace que si les malades atteints du Covid-19 sont isolés de leurs proches. Dans le cas contraire, un rebond épidémique est à craindre.
Étudiant en troisième année, je suis particulièrement intéressé par les sujets : politique, géopolitique et économie.