Culture

Le monde de l’édition face à la crise

Avec la fermeture de tous les commerces non essentiels à la survie de la nation, l’industrie du livre se retrouve en danger. Ce sont les librairies qui assurent normalement les revenus du monde de l’édition. Face à cette fermeture, différents plans d’aide sont mis en place.

Alors que les personnes confinées chez elles ressentent plus que jamais le besoin et l’envie de se divertir, l’industrie culturelle a dû fermer, en raison de la crise sanitaire, les portes de ses cinémas, de ses musées et de ses librairies. Or, la fermeture des librairies signifie une perte nette des revenus pour les auteurs et éditeurs. Si ces derniers en profitent pour opérer un virage numérique en misant sur les ebooks, un mouvement de solidarité s’organise partout dans le monde autour des libraires pour les aider à surmonter la crise.

Aux États-Unis, les plus grands éditeurs de comics ont un objectif en tête : sauver les comicshops. Jim Lee, artiste légendaire du milieu mais aussi Publisher chez DC Comics, a lancé un challenge sur les réseaux sociaux : produire un dessin par jour, qui sera revendu sur Ebay et dont les bénéfices serviront une association de soutien aux comicshops. Todd Macfarlane, créateur de Spawn et de la maison d’édition Image Comics, a annoncé que le marché numérique ne sera qu’une « rustine » et que tous les éditeurs doivent répondre présents pour soutenir cette industrie après la crise.

En Italie, la situation est également alarmante, 64% des éditeurs ont eu recours à des plans de licenciements. Ricardo Franco Lévy, président de l’AIE, déclare : « J’en appelle au gouvernement et au parlement : allumez un phare sur le monde du livre. Vous le perdez ». Pour l’ensemble des éditeurs italiens, la crise serait déjà dramatique, et elle n’est pas prête de se finir.

Puisque le problème est mondial, la solution doit être internationale. C’est pourquoi la Fédération des Éditeurs européens (FEE)  a adressé une lettre ouverte aux différents ministres de la culture de l’Union européenne : « Le secteur souffre déjà d’une perte cumulative de 25% de son chiffre d’affaires pour 2020. » La FEE encourage les différents pays de l’UE à acheter massivement des livres pour remplir les bibliothèques, dans le but de soutenir la reprise du secteur. Franck Riester, ministre de la culture a annoncé que « le secteur culturel ne pourra pas survivre dans les prochaines semaines, ni redémarrer demain, sans un soutien public massif ».

L’édition française dans la tourmente

« Les éditeurs les plus conciliants vont remettre le règlement des factures à 12 mois. Mais bien sûr c’est Amazon qui va profiter de la crise », affirme Catherine, libraire à Paris. Selon certains éditeurs, le marché des ebooks serait en pleine expansion. D’après Philippe Goffe, administrateur de librel.be : « Depuis le début de la crise, les ventes grimpent de 270% et en incluant les offres gratuites, la croissance est de 1.300% ! ». Les éditeurs français multiplient alors les offres marketing et promotionnelles pour occuper le terrain comme le Seuil qui propose des livres numériques gratuits.

Christine*, représentante d’un grand éditeur, est exaspérée par la situation : « À un moment les libraires vont devoir payer les échéances avec une trésorerie dans le rouge. Pendant ce temps, je travaille pour un grand groupe qui fait vivre beaucoup d’actionnaires, alors que les librairies indépendantes risquent de fermer, eux toucheront leurs dividendes après la crise. » Un manque de solidarité qui reflète une forme d’impunité fiscale française.

Alors que le marché du livre a enregistré une baisse de 62% durant la première semaine du mois d’avril, certains libraires comme Original Comics à Paris ou la librairie Ravy à Quimper tentent de maintenir leur activité par la vente en ligne. Conscient de la situation, le Centre national du Livre (CNL) a mis en place un plan d’urgence avec une enveloppe de 5 millions d’euros pour les éditeurs, les auteurs et les libraires.

Une crise sanitaire qui laissera de profondes séquelles sur l’industrie du livre, notamment sur le calendrier des sorties littéraires qui se retrouve chamboulé. Or, dans la chaîne du livre, quand un maillon fait défaut, ce sont avant tout les plus fragiles qui sont en péril : auteurs, libraires et éditeurs indépendants vont devoir travailler ensemble pour reconstruire l’édition française.

+ posts

Diplômé de l'École Normale Supérieure en philosophie contemporaine, cherche à comprendre pour mieux informer.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

X