À l’instar de l’Église Shincheonji de Jésus en Corée du Sud ou l’Église la Porte ouverte chrétienne à Mulhouse, les rassemblements évangélique ont joué un rôle important dans la transmission de la maladie. Des tragédies qui nous rappellent les risques que peuvent poser l’emprise d’une croyance.
Lors d’un rassemblement évangélique fin février, l’Église la Porte ouverte chrétienne à Mulhouse réuni plus de 2000 personnes durant plusieurs jours. Début mars, plus d’un millier de participants sont testés positif au coronavirus. Ce rassemblement provoque une hausse importante de la contamination dans la région Grand Est, mais également en France, l’événement ayant rassemblé des fidèles de tout le territoire. Le 25 mars dernier, l’église fait état au de 17 décès parmi ses fidèles. De nombreux membres sont encore hospitalisés ou confinés et malades.
« Nous croyons à la guérison des malades par la foi en Jésus-Christ. »
Fin février, alors qu’aucune mesure n’est encore prise pour empêcher les rassemblements, l’église de Mulhouse ne peut pas encore se douter des risques encourus. Mais sur son site internet, l’église liste dans ses valeurs fondamentales un propos ambigu après la tragédie qui l’a touchée : « Nous croyons à la guérison des malades par la foi en Jésus-Christ en vertu de son œuvre rédemptrice. »
Pour la porte-parole de l’UNADFI (Union nationale des Associations de défense des Familles et de l’Individu), association de prévention des dérives sectaires, ce discours est empreint de la culture évangélique : « Dans ce mouvement, la promesse de guérison est assez courante. Cela peut être problématique quand celle-ci risque d’éloigner une personne malade d’un traitement. Mais on peut parfois également l’apparenter à un moyen de faire du prosélytisme, car la croyance apparaît comme une solution universelle, à tous les problèmes. Au Brésil, il y a un lobby évangélique très implanté, on observe notamment les dérives de ce genre de discours quand le président Jair Bolsonaro refuse toujours de fermer les cérémonies de culte, qu’il privilégie les croyances de son électorat à la santé publique. »
Le sermon, une affaire de beaux discours
Pour toucher plus facilement leur public, de nombreuses églises évangéliques retransmettent leurs prêches en direct sur le web. Le 8 mars, le Pasteur Yvan Castanou de l’église évangélique Impact Centre Chrétien basée à Boissy-Saint-Léger, débute son sermon en exposant son point de vue sur la pandémie : « Il y a une épidémie de virus et il y a une épidémie de peur qui est beaucoup plus terrible et redoutable que la première. (…) La plupart des politiciens savent que ce n’est pas une catastrophe nationale. Ce sont les médias. Le matin : Corona ! L’après-midi : Corona ! Quand tu te couches : Corona ! Les médias contribuent à répandre la peur, mais ils ne sont que des instruments, pas les fautifs. Qui opère derrière ? ». S’ensuit une personnification du Mal dans le virus. « Ce qui va précéder la venue [de l’Antéchrist], c’est la peur et la terreur. Il prépare son plan pour contrôler la Terre par le gouvernement mondial ! » La vidéo totalise près de 500 000 vues sur YouTube.
Quatre jours après, l’église annonce après la mise en application des mesures d’urgence sanitaire, délivrer ses prêches uniquement en ligne. « On a reçu de nombreux signalements depuis deux ans sur Impact Centre Chrétien » indique la porte-parole de l’UNADFI. « C’est la rapidité de leur croissance qui nous inquiète notamment. » Le pasteur Yvan Castanou est un ex-entrepreneur dans le e-business. Il est issu d’une influente famille du Congo-Brazzaville et est le neveu d’Antoinette Sassou Nguesso, première dame du pays tenu d’une main de fer par la famille depuis plus de vingt ans.
« La théorie du complot est un aspect récurrent des dérives sectaires. Elle nourrit la radicalisation des personnes. Le discours apporte tous les éléments pour conforter les adeptes dans leur foi, jusqu’à les enfermer dans leur croyance. Cet enfermement psychique devient physique quand les personnes se détournent de tout discours extérieurs, l’irrationnel prend le pas sur le rationnel. »
Le 19 mars, le pasteur Samuel Peterschmitt de l’Église la Porte Ouverte chrétienne à Mulhouse, sorti après huit jours d’hospitalisation, exprime ses pensées aux malades encore hospitalisés et exhorte ses fidèles à rester confiner. Un message dont la portée n’atteindra pas le demi-million de vues du prêche de Impact Centre Chrétien, annonciateur de la venue de cet Antéchrist tant redouté.