Selon un communiqué des douanes françaises, le déficit du commerce extérieur s’élevait en février à 5,5 milliards d’euros. Après les mesures de confinement et la fermeture de toutes les frontières, Les Français peuvent craindre un recul encore plus important de la croissance. Plus qu’un enjeu économique, l’isolationnisme est aussi un enjeu social et sanitaire.
Ce sera sans nul doute la plus grosse crise depuis 2008. Elle ne sera cependant pas structurelle comme pouvait l’être la précédente. Ce n’est pas le capitalisme qui est directement concerné aujourd’hui mais plutôt les systèmes de santé mondiaux. Les retombées économiques de la pandémie qui traverse le globe pourraient pourtant remettre en question tous nos modes de consommation et de production.
C’est la thèse de nombreux économistes dont Nadine Levratto, directrice de recherche au CNRS, qui affirme : « Les chaînes globales de commodités, de valeur et autres réseaux globaux de production sont des colosses aux pieds d’argile dont la sensibilité aux chocs appelle un changement de modèle de production. » La France ne peut plus être dépendante du commerce extérieur et en particulier de la Chine. Une partie de la production industrielle et agroalimentaire devra être relocalisée sur le territoire. De ce fait, une montée de l’isolationnisme et du protectionnisme aux quatre coins du monde est à craindre.
Les altermondialistes ainsi que certains libéraux perçoivent cette crise comme un signal d’alarme sonnant la mort du capitalisme et de l’économie de marché. Cette économie fluctuante est en effet soumise aux caprices du hasard. Après les premières mesures de confinement aux États-Unis, le chômage explose, passant de 284.000 demandeurs d’emploi le 14 mars à 6,68 millions le 2 avril selon Mediapart. Une situation commune pour tous les pays libéraux, qui laissera de profondes séquelles économiques.
Réduire les flux migratoires pour protéger les systèmes de santé européens
Camps de réfugiés, Pont de la Chapelle, Paris. Crédit : Flickr
Fermer les frontières ou a minima renforcer les contrôles, c’est bien entendu réduire les flux migratoires. Ursula von der Leyen, présidente de la commission européenne, souhaite garder les frontières closes au-delà de Pâques et déclare : « L’objectif de cette mesure était d’empêcher des gens qui n’habitent pas l’Union européenne de venir se faire soigner en Europe alors que le système sanitaire est totalement saturé. » Évidemment, tous les systèmes de santé ne se valent pas, notamment en termes de qualité des soins mais aussi au niveau du prix des prestations.
La situation des migrants, réfugiés et primo arrivants inquiète aussi les nombreuses associations qui viennent en aide aux personnes les plus défavorisées. À l’image d’Éric Émery, professeur de français bénévole à l’association BAAM qui s’inquiète des conditions de vie qui se dégradent pour ceux qui sont à la rue, « les quelques lieux où ils pouvaient trouver de l’aide, un abri ou simplement d’autres personnes à rencontrer ferment tous un à un. » En plus d’être un problème social, les migrants représentent aussi un enjeu sanitaire. Ils ne peuvent simplement pas se protéger face au virus et risquent par conséquent leur vie et celle des autres en le propageant.
Le confinement généralisé a donc des conséquences sanitaires et économiques importantes. En maintenant seulement les activités économiques essentielles c’est un tiers de l’économie française qui est paralysé, soit entre deux et quatre points de PIB par mois selon les économistes. Des conséquences parfois insolites émergent encore, comme la fermeture de la frontière allemande en Moselle qui ravive d’anciennes tensions. Surtout qu’il faudra encore mobiliser des policiers et des douaniers supplémentaires pour maintenir les contrôles.
Les frontières physiques restent en effet ouvertes et les contrôles y sont fréquents. Laurent Cesco, douanier au Perthus, à la frontière espagnole, affirme que les douaniers « sont sollicités pour le contrôle des marchandises et des transports de marchandises essentielles », mais « le trafic routier est divisé par dix, c’est une vision morbide, le pays est à l’arrêt… » Ils doivent également rester vigilants contre les menaces terroristes qui sont encore à craindre comme le montre l’attaque récente à Romans-sur-Isère. Les plans antiterroristes sont toujours en vigueur.
« Nos collègues espagnoles interdisent l’accès au territoire », affirme Laurent Cesco, avant d’ajouter : « des dizaines de milliers de ressortissants européens sont éjectés des pays du Maghreb dans lesquels ils étaient en vacances, ils essayent maintenant de rentrer chez eux, ils transitent par l’Espagne pour aller en Angleterre, en Hollande ou en Allemagne le plus souvent. » Les ressortissants européens sont encore sur les routes, même si leur nombre diminue.
Diplômé de l'École Normale Supérieure en philosophie contemporaine, cherche à comprendre pour mieux informer.