Médecin du mythique club de football du Stade de Reims depuis plus de vingt ans, Bernard Gonzalez a mis fin à ses jours le 5 avril. Testé positif au Covid-19, l’homme de 60 ans aurait laissé derrière lui une lettre dans laquelle il associe son acte à la maladie. Un geste plein de désespoir qui met plus que jamais en lumière les séquelles psychologiques que peut engendrer cette épidémie chez le personnel soignant.
L’émotion était à son paroxysme au sein du Stade de Reims et de la famille du football français après l’annonce du décès de Bernard Gonzalez, médecin emblématique du club rémois depuis 23 ans. Médecin, artiste, stadiste : tels ont été les maîtres-mots du Stade de Reims pour rendre hommage au docteur Gonzalez à travers un vibrant communiqué sur son site internet.
Jean-Pierre Caillot, le président du club rémois, a également témoigné : « Les mots me manquent, je suis abasourdi, prostré devant cette nouvelle. Cette pandémie touche le Stade de Reims en plein cœur, c’est une personnalité de Reims et un grand professionnel du sport qui nous a quittés. »
Des propos qui confirment à la fois la trace indélébile qu’a laissé l’homme de 60 ans au sein de son institution, mais également le constat sans appel quant à l’impact psychologique du coronavirus. La détresse mentale causée par cette maladie serait en effet la raison plus plausible du suicide de Bernard Gonzalez compte tenu de la lettre qu’il a laissé en guise d’adieu.
Dans cette dernière, le défunt médecin ferait un lien direct entre sa contamination au Covid-19 et son geste de désespoir. Un acte d’autant plus surprenant que le docteur Gonzalez semblait être en pleine forme quelques jours auparavant selon une source à l’AFP. Si ce cas de suicide d’un membre du personnel soignant est pour le moins rare et isolé, il témoigne des réels dommages psychologiques que le virus peut causer sur les professionnels de santé, en première ligne face à sa propagation.
« La psychose nous a envahi »
Un climat de vie de plus en plus anxiogène pour les soignants, qui s’explique principalement par leur crainte de transmettre le virus à leurs proches en cas de contamination, et par la précarité grandissante de leurs conditions de travail et de sécurité.
« Nous sommes comme des soldats envoyés au front sans les armes nécessaires. On est en manque de masques et de gel hydroalcoolique, déclare Jeannette, infirmière libérale en région parisienne et guérie du coronavirus. En tant que mère, j’ai une lourde responsabilité vis-à-vis de ma famille. Je fais de mon mieux pour toucher le moins de choses possible à la maison et désinfecter tout objet où j’ai posé mes mains. On est obligés de prendre des mesures draconiennes, la psychose nous a envahi. »
Les plateformes de soutien psychologique émergent
Pour remédier à cette situation alarmante et éviter tout risque de traumatisme et de burn-out, différents dispositifs téléphoniques ont vu le jour ces dernières semaines, en proposant gratuitement un accompagnement psychologique au personnel soignant.
Parmi ces systèmes, on compte les lignes téléphoniques mises en place par les hôpitaux, le nouveau site internet psyformed.com ou encore le numéro vert de l’association Soins aux Professionnels en Santé. Présente bien avant le début de l’épidémie, cette plateforme ouverte 24h/24 et 7j/7 propose des entretiens totalement anonymes. Une méthode a priori efficace, qui attire de plus en plus de personnes en cette période d’épidémie.
« On est de plus en plus sollicités. Les soignants sont demandeurs et ressentent un vrai besoin de vider leur sac, déclare l’un des psychologues de la plateforme. Je n’aurai pas la prétention de dire que toutes les personnes qui nous sollicitent sont satisfaites du service, mais la plupart d’entre eux en tirent du positif. Pour eux, nous avons la possibilité de faire un vrai suivi ou bien de les mettre en contact direct avec des psychologues de leur département. Il y a des motifs de satisfaction. » Ces dispositifs de soutien psychologique et moral envers les soignants font quelque peu office de lueur d’espoir dans le marasme ambiant qui règne actuellement dans l’univers hospitalier.
De quoi pour autant considérer ces aides comme salvatrices ? Pas forcément quand on prend connaissance des situations parfois précaires dans lesquelles travaillent les membres du personnel hospitalier. Elles ont néanmoins le mérite de leur remonter le moral, le temps d’un instant, à l’instar des applaudissements qui leur sont réservés chaque soir sur les coups de 20 heures.